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L’année 1632 touchait à sa fin. L’électeur de Saxe, Jean-George, un des chefs de la ligue protestante, sauvé l’année précédente par Gustave-Adolphe des mains de Tilly, était dans la Haute-Saxe avec son général d’Arnheim, gardant la ligne de l’Elbe et occupant Dresde, Torgau, Wittemberg. Wallenstein, duc de Friedland, généralissime de l’empereur, crut le moment venu de frapper un grand coup. Il se jeta sur la Saxe, prit Leipzig et s’y établit fortement, dans le dessein d’inquiéter les derrières de l’électeur, tandis qu’il envahirait la Basse-Saxe, restée presque sans défense. Jean-George effrayé avait appelé à son secours son allié, le vainqueur de Tilly, le roi de Suède, Gustave-Adolphe. Celui-ci achevait alors la conquête de la Bavière. Au lieu d’aller attaquer la ligue catholique dans son chef et de marcher sur Vienne, comme le voulait le profond et politique Oxenstiern, le roi avait mieux aimé écraser l’électeur de Bavière, Maximilien; il s’était emparé de Munich, sa capitale, et lui prenait successivement toutes ses villes, afin de n’avoir plus devant lui qu’un seul ennemi debout, l’empereur; mais, en apprenant l’invasion subite de la Saxe, il avait été contraint d’abandonner la Bavière : il s’était rendu à Erfurt, et, après y avoir embrassé et mis à l’abri du danger sa femme bien-aimée qui le suivait dans toutes ses campagnes, il accourut à marches forcées à travers d’affreux chemins dans la Basse-Saxe. Il arriva le 1er novembre à Naumbourg. Là on lui dit que le meilleur des lieutenans de Wallenstein, le comte de Papenheim, venait de quitter l’armée impériale avec un corps nombreux pour aller faire une pointe en Westphalie et délivrer Cologne menacée. Sur-le-champ il prend la résolution de profiter de cette circonstance, et, tournant Weissenfelds dont le général autrichien Colloredo s’était déjà emparé, il s’avance sur le chemin de Leipzig et trouve à Lützen Wallenstein, décidé de son côté à accepter la bataille. Elle eut lieu le 6 novembre 1632.

Les deux armées étaient fort inégales en nombre : les Suédois n’étaient pas plus de vingt mille; les impériaux avaient de trente à trente-deux mille hommes. Le théâtre de l’afifaire était la grande route de Leipzig à Weissenfelds : les Suédois au nord, les impériaux au midi, et les uns et les autres touchant à Lützen, ceux-ci par leur droite, ceux-là par leur gauche.

Il fallut attendre que les brouillards du matin fussent dissipés, et le combat ne commença que vers onze heures. Wallenstein avait fait tous ses préparatifs. Sur le bord du chemin qui le séparait de l’ennemi, il avait creusé deux grands fossés et çà et là hérissé le terrain de retranchemens habilement disposés. Nous ignorons comment il avait distribué les postes entre ses différens généraux; mais nous savons que Gustave-Adolphe avait confié son aile gauche au