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SCIENCES NATURELLES.

où l’eau est la plus profonde. En coupant cette natte ou en l’enlevant par portions, on a rendu accessible la vase qui est au-dessous, et c’est là seulement que se trouvent les os du dronte. Dans le sol tourbeux, qui forme en d’autres points une couche assez épaisse au-dessus de la vase, on n’a rencontré que des os de tortues, de cerfs, de flamans, de poules d’eau, de pluviers et de quelques autres oiseaux, mais pas un seul de dronte. L’existence des flamans à l’île de France était encore connue des parens de plusieurs habitans du pays.

M. Clark a envoyé une certaine quantité de ses ossemens de dronte à Londres, où une partie a été vendue aux enchères, une autre déposée au Musée britannique. Tout récemment, M. Charles Coquerel en a rapporté une collection de Saint-Denis (de la Réunion). Ces précieux échantillons ont été accueillis par nos naturalistes avec une satisfaction facile à comprendre.

Malgré ces découvertes, il est une question qui divise encore les naturalistes. Quelles sont les affinités du dronte avec les espèces actuelles ? Tout récemment l’Académie des Sciences recevait dans une même séance deux mémoires sur cet oiseau réfractaire aux classifications. L’un est de M. Alphonse Milne Edwards ; il établit que le dronte doit prendre place à côté des colombes ; l’autre est de M. Gervais et Coquerel, il a pour but de mettre en évidence les rapports d’affinité du dronte avec les vautours. Colombe ou oiseau de proie, nous avons le choix.

MM. Gervais et Coquerel se fondent principalement sur l’étude du sternum et du bassin du dronte pour en faire une famille distincte alliée aux vautours en même temps qu’à certains gallinacés et à quelques échassiers. M. Milne Edwards, de son côté, convient que ces deux parties essentielles du squelette semblent éloigner le dronte des colombides, avec lesquels il a, sous d’autres rapports, et surtout en ce qui concerne les pattes, des ressemblances frappantes et incontestables. M. Owen, l’illustre anatomiste anglais, qui vient d’examiner à son tour les os nouvellement arrivés de l’île Maurice, n’hésite même pas à considérer le dronte simplement comme un pigeon marcheur. M. Milne Edwards fait ses réserves sur ce point : suivant lui, les particularités de structure que l’on remarque dans le bassin et dans l’appareil sternal du dronte ne sont pas de l’ordre de celles qui, chez les pigeons, caractérisent l’appropriation à un genre de vie de plus en plus terrestre. Il faudra donc ranger le dronte à côté des colombides, mais dans une division particulière de la même valeur.

Comme les îles Mascareignes ont servi d’asile au dronte et au solitaire jusqu’à la venue de l’homme, la plupart des îles situées entre Madagascar et la Nouvelle-Zélande ont probablement encore hébergé dans les temps historiques un certain nombre d’oiseaux, de types plus ou moins étranges et pour ainsi dire arriérés. À la Nouvelle-Zélande, leur race n’est même pas encore complètement éteinte ; certaines espèces indigènes, aux formes bi-