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du Rhône, du Rhin, de la Seine et de la Loire prit une nouvelle activité et reçut des améliorations. Charlemagne avait essayé d’unir le Rhin au Danube. Charles V forma le projet de réunir la Loire et la Seine par un canal ; mais ce projet ne fut pas exécuté. La Loire était l’artère principale de communication. Les paroisses des bords de ce fleuve auxquelles était imposée l’obligation d’entretenir les chaussées et les turcies, obtenaient des exemptions de subsides dans les années où le fleuve débordait. Quand la taille fut devenue perpétuelle elles eurent le privilège d’en être entièrement affranchies. Ce n’est pas que sur les fleuves les marchands et les voyageurs fussent complètement à l’abri de ces impôts de passage dont étaient frappées les routes. Des chartes nous montrent l’établissement de droits perçus sous le nom de tonlieu, au profit de l’abbaye de Saint-Denis, sur les bateaux qui apportaient dans la capitale les marchandises. Il y avait à Paris une hanse ou corporation de ceux qu’on appelait les marchands de l’eau ; elle remontait à l’époque romaine. On la trouve en effet mentionnée sur une inscription latine sous le nom de nautœ Parisiaci ; de pareils collèges de bateliers étaient au temps des empereurs chargés des transports sur les principaux cours d’eau de la Gaule. Philippe-Auguste, par lettres patentes de 1213, accorda aux marchands de l’eau, dont il est déjà question sous ses prédécesseurs, un droit de navigation pour subvenir à la construction d’un port destiné aux barques qui approvisionnaient la capitale de vin, de bois, de fourrages et de sel. D’autres corporations, des communautés jouissaient également du droit de percevoir des taxes sur les marchandises venues par eau. Les abus qui se glissaient partout au moyen âge pénétrèrent dans la perception de ces droits et portèrent souvent grand préjudice au commerce. Ils se continuaient encore pour la navigation de la Loire au temps de Louis XIV ; Colbert chercha à y mettre un terme. Les délégués choisis parmi les marchands des villes situées sur le fleuve employaient souvent pour leurs besoins personnels le produit de l’impôt perçu sur les bateaux et qu’on appelait droit de boëte. Un siècle plus tard ce furent les officiers des élections où passaient les levées qui perçurent des droits illégaux sur les fonds destinés aux réparations, sous prétexte d’assistance aux adjudications, aux visites et réceptions des travaux.

Le morcellement de l’administration et de l’autorité tendit donc à perpétuer chez nous le mauvais état de la viabilité. Aussi les premières tentatives de centralisation exercèrent-elles sur nos voies une heureuse influence. Louis XI, ce grand adversaire de la féodalité, renouvela l’ancien système des postes des Romains, afin de s’assurer des communications faciles avec les différentes parties de