Page:Revue des Deux Mondes - 1866 - tome 64.djvu/1041

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

plusieurs sortes d’erreurs : M. Scherer avait exprimé les premiers doutes, et M. de Sybel avait donné, avec un talent incontestable, une démonstration qui, pour les esprits attentifs, avait commencé de décider la question. Je ne réclame d’autre mérite que celui d’avoir entrepris à mes risques et périls, sur un point qui intéresse notre histoire nationale, un examen sérieux et indépendant, avec la ferme volonté, si j’arrivais à une entière conviction, d’apporter cet hommage sincère à la vérité, de quelque côté qu’elle m’apparût. À entendre M. Feuillet, nous nous appelons légion. Il y a du vrai en ce sens que beaucoup d’esprits désormais sont persuadés, comme nous, qu’il s’obstine dans l’erreur. — M. Feuillet me paraît mal raisonner quand il me reproche, ainsi qu’à M. de Sybel, de n’avoir pas été voir ses prétendus autographes. Il nous suffisait d’avoir vu ceux de M. le comte d’Hunolstein, qui joint une exquise bienveillance à la noblesse de sentimens ; nous savions de reste que les minutes n’étaient pas d’une autre écriture. Je déclare d’ailleurs, pour ma part, que je ne suis point expert en autographes : c’est d’après les raisons morales, historiques, littéraires, que je suis arrivé à la certitude ; les argumens extérieurs, quelque éclatante démonstration qu’ils m’aient pu fournir ensuite, ne me sont arrivés que par surcroit et comme un excellent appoint. M. Feuillet trouvera, je l’espère, mon explication fort naturelle : il n’y avait pas là matière à tant de points d’exclamation.

Les reproches de malveillance, de jalousie, de « tactique pitoyable, » vont de pair avec celui de s’être rangé du côté de l’étranger contre un recueil « national. » Ne dirait-on pas qu’il faut croire aux autographes de M. Feuillet sous peine de haute trahison ? Tout au moins vous êtes, en ce cas, un démagogue et, peu s’en faut, un buveur de sang. M. Louis Blanc, publiquement consulté par un journal anglais, déclare-t-il qu’il croit fausses les lettres discutées, on lui répond : « Mon recueil dérange les idées préconçues par l’écrivain, je le soupçonne, » et on reprend cette même thèse, par voie d’insinuation, contre ces critiques français « importunés de ce qu’on relève une reine ; » à quatre lignes de là, on a nommé en toutes lettres Marat, Chaumette, Hébert, et, quand j’ai pris à partie ceux qui ont appelé « période de l’expiation » le temps de la captivité, du procès et de la mort, quand j’ai dit que, s’il y avait eu une expiation, elle avait été acceptée par le roi et la reine non-seulement pour effacer par une humble obéissance à la pensée chrétienne toutes les fautes personnelles, mais pour payer encore par la vertu du sacrifice et du martyre tant de fautes commises par d’autres dans le passé, on ne craint pas de m’imputer la pensée et l’expression mêmes que je combats. — M. Feuillet de Couches s’est permis de prononcer l’accusation d’« outrecuidance dont il faut enfin faire justice » (page CXIII de son introduction) et d’insinuer celle de déloyauté (page CXVIII). Il n’y a point à s’en irriter, au contraire, car décidé-