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travers tous les intervalles, jusqu’à la base de celle-ci. Cette disposition est des plus favorables pour retarder la vitesse des gaz et multiplier les surfaces de contact entre le gaz ascendant et l’eau qui doit dissoudre l’acide chlorhydrique. Au bas de la tour, on recueille une dissolution d’acide chlorhydrique ; à la partie supérieure s’échappent librement les gaz qui n’ont pas été condensés, et qui, ne contenant plus d’acide, sont inoffensifs. Une commission spéciale d’experts, dont M. Hofmann, membre de l’Académie royale des Sciences de Londres, était le rapporteur, a constaté que ces gaz, dans les expériences auxquelles la commission se livra, n’exercèrent aucune action sur l’azotate d’argent et sur la teinture bleue de tournesol ; ils ne contenaient donc pas même des traces d’acide chlorhydrique, car les plus petites quantités auraient été immédiatement révélées par ces deux réactifs si délicats. Il ne faudrait pas espérer que la pratique industrielle donne constamment un résultat aussi parfait que celui qu’a observé la commission. Dans une exploitation industrielle, les choses ne se passent pas toujours comme dans une expérience soigneusement préparée ; cette dernière peut du moins montrer que le procédé a une réelle valeur, et elle doit faire espérer que, même en tenant compte des fuites qui peuvent se produire dans la maçonnerie, des tassemens dans la colonne de coke, de quelques négligences inévitables dans un travail continu de jour et de nuit, ce procédé fera disparaître les principales causes de plaintes, et restreindra les inconvéniens au voisinage immédiat de l’usine.

Nous n’avons pas grand’chose à dire de l’opération par laquelle le sulfate de soude est transformé en carbonate de soude en présence du charbon et de la chaux. Nous en avons indiqué la théorie ; cette transformation s’effectue à la température rouge, dans un four à réverbère, c’est-à-dire dans un four recouvert d’une voûte. Cette voûte renvoie sur la masse à traiter, qu’on étale sur la sole du four, la chaleur d’un foyer placé en avant. La flamme rampe le long des parois supérieures du four en se rendant à la cheminée. Des ouvriers brassent la matière pendant l’opération, pour faciliter la réaction en assurant le mélange intime des divers corps. Nous supposerons cette opération terminée, le lavage du résidu fait, les lessives évaporées, et le carbonate de soude, qui est le produit définitif, obtenu. Il semble que les fabricans soient au bout de leurs peines ; il n’en est rien : ils ont eu encore bien des préjugés à combattre, bien des occasions, qu’ils ne cherchaient pas, d’exercer leur esprit inventif.

Les soudes brutes artificielles différaient entièrement par l’aspect des carbonates de soude naturels auxquels l’industrie était accoutumée. Aussi le produit nouveau fut-il accueilli avec une