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d’acide en solution que le commerce n’en réclamait, et on ne trouva plus le placement de ces encombrans produits accessoires. Une autre difficulté imprévue se présenta : on ne parvenait pas à dissoudre tout l’acide chlorhydrique. formé, et le courant gazeux que l’on laissait enfin échapper dans l’atmosphère était encore chargé de vapeurs acides corrosives. Ces vapeurs attaquaient les ferrures des bâtimens, se condensaient dans les stomates des feuilles, qui se desséchaient et tombaient aussitôt. Les mêmes vapeurs, répandues au milieu de l’air atmosphérique, exerçaient une pernicieuse influence sur la santé des populations environnantes. Ce n’étaient pas seulement les abords immédiats de l’usine qui ressentaient les fâcheux effets de ces émanations, les vents les portaient à de grandes distances. Péclet a pu reconnaître, à plus de 20 kilomètres de certaines usines à soude, des signes non équivoques de la présence dans l’air de gaz chlorhydrique exhalé de ces usines dans l’atmosphère. Si les habitans de la contrée où fonctionnaient les fabriques de soude étaient justement alarmés d’un pareil état de choses, le propriétaire de l’usine n’avait pas lieu d’être plus rassuré de son côté, car les inconvéniens qu’il imposait à ses voisins et dont il était responsable pouvaient se chiffrer en argent ; la menace d’avoir à payer des dommages écrasans était suspendue sur sa tête, et la découverte d’un moyen de condenser ou recueillir tout l’acide chlorhydrique devenait pour les soudières une question de vie ou de mort. Toutes ces difficultés ont été surmontées, et, comme il arrive souvent dans l’histoire des industries chimiques, chacune d’elles est devenue au contraire l’origine d’un progrès nouveau, d’un perfectionnement lucratif. L’acide chlorhydrique, que l’on parvenait à condenser, n’avait pas de débouchés suffisans : il fallait trouver des applications nouvelles de cet acide, en multiplier l’emploi dans les arts industriels. Ce problème fut résolu et donna lieu à plusieurs perfectionnemens intéressans d’industries diverses. Nous ne pourrions en donner le détail sans sortir de notre sujet ; on a pu voir plus haut combien les applications de ce corps chimique sont variées : un grand nombre ont été trouvées sous l’empire de cette nécessité si pressante de condenser l’acide chlorhydrique ou de lui trouver des débouchés. Restait la seconde difficulté, épurer l’air de toute émanation acide ; celle-là était plus grave, et, après avoir donné lieu aux expériences les plus curieuses, n’a été que depuis peu complètement résolue. Les usines qui étaient assez heureuses pour avoir auprès d’elles de vieilles carrières abandonnées songèrent d’abord à enfouir dans ces vastes profondeurs crayeuses les.vapeurs incommodes. Le remède était tout local, de plus il était mauvais. Le carbonate de chaux, dont étaient formées les parois de ces carrières, était attaqué par l’acide chlorhydrique et