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ciel soit rempli d’étoiles, et l’air, et l’éther ! » Dieu dit, et cela fut. »

Cette dernière phrase semble une réminiscence de la Bible ; cependant il est difficile de trouver dans l’ensemble de l’ouvrage une influence juive. L’auteur aborde plusieurs questions qui tiennent une place importante dans la théologie chrétienne, et les solutions qu’il donne sont très différentes de celles du christianisme. Il décrit la création des âmes, dont la Bible ne dit rien, et il la décrit minutieusement, comme une opération chimique. Le discours que Dieu leur adresse après les avoir créées rappelle l’allocution du Dieu suprême aux dieux inférieurs dans le Timée de Platon : « O âmes, beaux enfans de mon souffle et de ma sollicitude, vous que j’ai fait naître de mes mains pour vous consacrer à mon monde, écoutez mes paroles comme des lois, ne vous écartez pas de la place qui vous est fixée par ma volonté. Le séjour qui vous attend est le ciel avec son cortège d’étoiles et ses trônes remplis de vertus. Si vous tentez quelque innovation contre mes ordres, je jure par mon souffle sacré, par cette mixture dont j’ai formé les âmes et par mes mains créatrices, que je ne tarderai pas à vous forger des chaînes et à vous punir. »

Dieu associe ensuite les âmes à l’œuvre de la création ; il les invite à former les animaux en leur donnant pour modèles les signes du zodiaque et les autres animaux célestes. Les âmes, fières de leur œuvre, s’écartent des limites prescrites, et en punition de leur désobéissance sont condamnées à habiter les corps. Il n’y a rien là de pareil au dogme du péché originel ; la chute des âmes est la conséquence d’une faute qui leur est propre, et non l’héritage d’un ancêtre commun. Ce serait plutôt quelque chose d’analogue à la doctrine de la descente des âmes telle qu’elle est exposée dans les ouvrages des platoniciens et surtout dans l’Antre des Nymphes de Porphyre, avec cette différence toutefois que, pour les Grecs, l’incarnation est un acte librement accompli : l’âme, entraînée par le désir, descend volontairement dans la sphère de la vie. Cette doctrine n’était pas particulière aux platoniciens ; elle se trouvait dans le poème d’Empédocle et dans d’autres écrits de l’école pythagoricienne. Les auteurs qui en parlent la rapportent souvent aux initiations mystiques : il est donc difficile de dire s’il faut en faire honneur à la philosophie ou à la religion ; encore moins peut-on savoir à quelle source a puisé l’auteur du Livre sacré.

Macrobe, dans son commentaire sur le Songe de Scipion, nous montre les âmes descendant du ciel par degrés successifs et recevant dans chacune des sept sphères une faculté spéciale. L’action des dieux planétaires sur la vie humaine est exposée aussi, mais d’une façon plus obscure, par l’auteur du Livre sacré. Il décrit