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publique, augmente le gage sur lequel repose la créance, et que lorsqu’elle se réalisera, il ne sera pas difficile de leur faire leur part dans la plus-value que donnera le rendement naturel des impôts. Par conséquent, si ce n’est pas pour l’amortissement une ressource actuelle, c’est au moins une ressource de l’avenir, qu’elle soit ou non l’objet d’une affectation spéciale.

Mais pourquoi, dira-t-on, cette nouvelle complication ? Autrefois nous n’avions qu’un budget qui comprenait les dépenses ordinaires et extraordinaires, même les dépenses d’ordre ; on y ajoutait les crédits supplémentaires, qui étaient ouverts par ordonnances ou par décrets, et le tout formait un total facile à saisir. Aujourd’hui nous avons d’abord le budget ordinaire, puis le budget extraordinaire, puis le budget rectificatif, et enfin le budget complémentaire, sans compter les petits budgets d’ordre, — en tout quatre budgets principaux, et voilà qu’on en ajoute un cinquième sous le nom de « caisse d’amortissement. » Nous n’avons pas besoin de ce surcroît de complication. Il est bien évident que si la nouvelle caisse d’amortissement, de même que le sénatus-consulte de 1861, n’avait pour effet que de créer une nouvelle comptabilité sans autre profit, ce ne serait pas la peine de l’établir ; mais on est injuste envers le sénatus-consulte de 1861 lorsqu’on prétend qu’il n’a eu d’autre effet que d’embarrasser la comptabilité. Il a eu l’avantage aussi, en mettant fin à l’ouverture des crédits supplémentaires par décret et en n’autorisant les dépenses que sur crédits votés par le corps législatif, de rapprocher le contrôle des faits sur lesquels il est appelé à s’exercer et par conséquent de le rendre plus efficace. Autrefois les crédits supplémentaires étaient ouverts quinze ou dix-huit mois avant d’être soumis au corps législatif ; les faits étaient depuis longtemps consommés, et on n’avait plus qu’à les ratifier. Aujourd’hui on demande les crédits lorsque les faits sont encore présens, lorsqu’il serait possible à la rigueur de les modifier[1]. Le sénatus-consulte fournit donc les élémens d’un contrôle plus sérieux. Si le corps législatif ne l’exerce pas comme il le doit, s’il se laisse trop aller aux entraînemens vers des dépenses peu justifiées, c’est sa faute, et il ne faut pas s’en prendre au sénatus-consulte. On a mis entre ses mains une arme plus efficace que celle qu’il avait jadis, c’est à lui de s’en servir comme il le doit dans l’intérêt du pays.

Le même raisonnement peut s’appliquer à la nouvelle caisse d’amortissement. Sans doute elle crée une nouvelle annexe au

  1. Excepté pourtant en ce qui concerne l’expédition du Mexique ; mais cette expédition est tellement en dehors de toutes les règles d’une bonne comptabilité financière, qu’il devient impossible de la prendre pour exemple.