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1848, sauf un moment en 1859 et 1860. Depuis 1848, nous avons supprimé l’amortissement non par système, mais par nécessité, parce qu’il nous a semblé qu’il valait mieux se servir des ressources de l’amortissement pour équilibrer nos budgets tant bien que mal que de recourir à des aggravations de taxes qui eussent été fort préjudiciables à la richesse publique et fort impopulaires. — Aujourd’hui enfin, sans autre aggravation de taxe que celle qui a eu lieu en 1862, aggravation considérable, il est vrai, puisqu’elle n’a pas été moindre de 74 millions à la fois, mais à laquelle le pays commence, à s’habituer comme on s’habitue à tout, on nous offre la perspective d’un excédant de recettes pour 1867, et on songe à rétablir l’amortissement. — Sous quelle forme le rétablira-t-on ? — Sera-ce en revenant au système de 1816, modifié en 1833, et qui assure à l’amortissement une dotation aujourd’hui de 122 millions ? Sera-ce sous la forme anglaise, en consacrant purement et simplement à l’extinction de la dette, sans système aucun, nos excédans de recettes, ou bien sera-ce par un système nouveau qui affectera encore des ressources spéciales à l’amortissement ?

Avant de nous prononcer sur aucun de ces systèmes, il importe d’interroger les précédens et de savoir quels ont été chez nous les principes et les faits. Je ne veux pas remonter plus haut que 1816, ni parler de la caisse de M. de Calonne en 1784, qui fut détruite par la révolution, ni des systèmes qui furent essayés sous le consulat et l’empire. J’arrive tout de suite à la législation de 1816 et 1817, qui a établi en quelque sorte le principe de l’amortissement en proportionnant la dotation à l’importance de la dette. La loi de 1816 affecta d’abord 20 millions à l’amortissement, lesquels devaient être pris sur le revenu des postes, et, en cas d’insuffisance, sur les autres revenus publics. La loi de 1817 augmenta cette dotation et la porta à 40 millions en la prenant toujours sur certaines branches de revenu déterminées, telles que le produit net de l’enregistrement, du timbre et des domaines, des postes, etc., et en y ajoutant une dotation immobilière, celle des bois de l’état. Cette dotation de 40 millions représentait à peu près 1 pour 100 du total de la dette à cette époque. Malheureusement, comme on était obligé d’emprunter pour liquider les désastres des dernières guerres, on empruntait et on amortissait en même temps, ce qui ne contribuait pas à diminuer la dette. Bientôt pourtant, de 1819 à 1822, on eut des excédans de recettes, l’amortissement put fonctionner régulièrement, et sous l’influence des rachats qui eurent lieu avec ces excédans, le 5 pour 100, de 59 en 1816, s’éleva jusqu’au-dessus du pair en 1824, et cela malgré une émission de rentes considérable qui suivit les emprunts (environ 110 millions).