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de vignes[1], et assaillit la partie du mur qui s’étend de la porte Saint-Pancrace à la porte Settimiana. Ceux qui la défendaient ne firent pas une longue résistance. Saisis de crainte, ils quittèrent les remparts[2], s’enfuirent éperdus, et laissèrent les impériaux pénétrer dans le Trastevere, d’abord par la porte Settimiana, ensuite par la porte Saint-Pancrace. Confondus d’une victoire si prompte et craignant que cet abandon extraordinaire du Trastevere ne cachât quelque piège, les lansquenets et les Espagnols marchèrent en compagnies serrées vers le pont de Sixte IV. Les portes en chêne et très solides qui s’élevaient à son extrémité n’étaient pas même fermées ; il n’y avait personne pour le garder et en empêcher le passage[3]. Les impériaux traversèrent le Tibre avec précaution, au bruit des tambours et des trompettes[4], et s’avancèrent lentement dans Rome, où régnait une immense consternation. Ils allèrent camper cette nuit dans le Champ-de-Flore et sur la place Navone. C’est de là que le lendemain matin ils se répandirent dans la ville épouvantée. Des habitans de Rome, la plupart étaient restés tremblans dans leurs maisons fermées ; beaucoup s’étaient entassés avec ce qu’ils avaient de plus cher, leurs femmes, leurs enfans, leurs richesses, dans des églises qui ne devaient pas être respectées ; quelques-uns avaient cherché un refuge dans des palais qui devaient être envahis[5].


VIII

Rome, livrée aux impériaux, fut mise à sac pendant huit jours[6]. Tous les excès qu’une soldatesque sans retenue comme sans obéissance peut imaginer dans son ivresse et commettre dans ses emportemens accablèrent la grande cité chrétienne, où les Espagnols et

  1. « Imminet Janiculus Transtiberinæ regioni plurimus qui circa imum frequens incolitur. Cœtera pars densis arbustis et directis vitium in quincuncem ordinibus usque ad ipsas urbis portas exculta est. « Grolier., p. 64.
  2. « Les nostres, qui desja estoient partie fuyz, partie escoulez…, jettèrent picques et sacquebuttes et prindrent la course près le Tèvre (Tibre)… le seigneur Rence à peine se sauva au chasteau, auquel lieu je le suivy avecques vingt-cinq gentils hommes françois, qui allasmes tousjours serrez. »> Lettre de Guillaume du Bellay. — Il Sacco di Roma, da Guicciardini, p. 189.
  3. Grolier, p. 71.
  4. Grolier, p. 61, et il Sacco di Roma, de Guicciardini, p. 108. — Sacco di Roma, da Jacope Buonaparte, p. 174.
  5. Grolier, p. 72 et sqq. — Il Sacco di Roma, da Guicciardini, p. 108-202. — Sacco di Roma, par Jacopo Buonaparte, qui en a été témoin et dont le récit a été imprimé pour la première fois à Cologne en 1756, et de nouveau à Paris en 1800 ; édition de Paris in-8o, p. 178-190.
  6. « Hæc atque alia ab hostibus per octo dies continenter gesta ; deinde cædes et direptio senescit. » — Grolier, p. 80.