Page:Revue des Deux Mondes - 1866 - tome 62.djvu/34

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

bientôt de secourir le duc Sforza dans le château de Milan, réduit aux abois. Le généralissime des confédérés partit de Marignan dix jours après, à la tête de tous les siens, pour aller au moins ravitailler le château, dont la conservation était d’une extrême importance et qui était imprenable autrement que par la famine. Il parut en vue de la garnison, rendue à l’espérance, et avec une armée très supérieure en force il n’osa ni traverser la ligne du blocus ni introduire dans la citadelle les vivres qu’il apportait pour elle. Aussi timide devant le château qu’il l’avait été devant la ville de Milan, il se retira sans avoir secouru le duc Sforza, comme il s’était retiré sans avoir attaqué le duc de Bourbon. Francesco Sforza, n’espérant plus désormais qu’on lui vînt en aide et ayant bientôt épuisé, dans le château où il était enfermé depuis plus de sept mois, tous ses moyens de subsistance, capitula le 25 juillet et livra cette forte citadelle au duc de Bourbon, qui en confia la garde au vieux Tansannes, l’un des gentilshommes du Bourbonnais entrés dans sa conspiration et l’ayant suivi dans sa fuite[1]. Prise au dépourvu en Italie, la puissance impériale s’y maintenait avec avantage en grande partie par la faute du roi de France, qui n’avait pas fait encore ce qu’il avait promis. François Ier, plus intéressé cependant que qui que ce fût aux succès de la ligue, n’avait ni expédié les galères destinées au blocus de Gênes, que gouvernait toujours le doge Hieronimo Adorno, dévoué à Charles-Quint, ni fait passer les Alpes aux 500 lances et aux 4,000 hommes de pied qui sous le marquis de Saluces devaient renforcer les confédérés, ni facilité, par l’envoi régulier des sommes nécessaires, la prompte levée des Suisses, sur lesquels les Italiens avaient besoin de s’appuyer pour agir avec plus de hardiesse.

Le pape et ceux de ses ministres qui l’avaient poussé à s’allier avec François Ier et à faire la guerre à Charles-Quint étaient irrités et effrayés des longs retards que le roi de France apportait dans l’exécution de ses engagemens. Le dataire Giberto écrivait avec douleur et dans une sorte de désespoir : « Les Français ne nous aidant pas autrement et ne prenant pas l’entreprise sur leurs épaules, ou nous succomberons, ou, ce qui est la même chose, nous nous accorderons. Et comme en tel cas les Français resteront seuls, s’ils ne le voient pas, ils sont aveugles[2]. » Clément VII avait envoyé le secrétaire Sanga pour presser François Ier, à qui l’évêque de Bayeux, son ambassadeur à Venise, écrivait : « Les lenteurs de votre majesté, qui inspirent tant de défiance aux confédérés

  1. Lettre du duc de Bourbon à l’empereur, du 27 juillet 1526. — Archives impériales et royales de Vienne.
  2. Lettre du dataire Giberto à l’évêque de Bayeux, du 1er août 1526. — Lettere di principi, t. II, f. 3, v°.