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prenait à son service[1]. Il défendait aux banquiers et aux marchands de Rome d’escompter les papiers des impériaux, et il interdisait aux sujets et aux vassaux du saint-siège de se mettre à leur solde[2]. Il annonçait le 13 juin, au consistoire des cardinaux, la conclusion de la ligue[3], et dans un bref fier et net il la signifiait à l’empereur lui-même.

Rappelant à Charles-Quint les services multipliés qu’il lui avait rendus, il lui disait que pendant la captivité du roi très chrétien, et lorsque le duc Sforza était assiégé par les généraux espagnols dans la citadelle de Milan, il n’avait pas, en sa considération, conclu une ligue dans laquelle on l’invitait à entrer. Il ajoutait que l’empereur l’avait payé de la plus noire ingratitude, que ses généraux l’avaient outragé, qu’ils lui avaient arraché des sommes d’argent qui ne lui avaient pas été rendues, que ses troupes avaient commis des déprédations dans les états de l’église aux dépens desquels elles avaient vécu, qu’il n’avait eu lui-même aucun égard à ses intercessions en faveur de Francesco Sforza, qu’il lui avait tenu cachées les conditions auxquelles il avait traité avec le roi de France, qu’il avait porté en Espagne et dans le royaume de Naples des édits contraires aux droits de l’église romaine et à la dignité pontificale. « Ces raisons, lui disait-il en finissant, m’ont décidé à m’unir en alliance avec ceux qui aiment le repos de l’Italie et la chose publique. Si tu veux de ton côté être en paix, c’est bien ; sinon, sache que ni les forces ni les armes ne me manqueront pour défendre et l’Italie et la république romaine[4]. »

Charles-Quint avait déjà reçu ce bref lorsque lui fut signifiée la ligue de Cognac, dans laquelle on lui avait laissé la faculté dérisoire d’entrer, et dont il ne pouvait pas faire partie sans rendre le duché de Milan à Francesco Sforza, sans retirer ses troupes de la Lombardie, sans renoncer à la Bourgogne, et sans délivrer les enfans du roi de France pour une simple somme d’argent. L’ambassadeur de François Ier, Jean de Calvimont, second président du parlement de Bordeaux, le comte Balthasar Castiglione, nonce de Clément VII, et André Navagero, ambassadeur de la république de Venise, vinrent l’informer officiellement d’une ligue qui avait pour objet l’amoindrissement non moins que l’humiliation de sa puissance, et lui demander d’y adhérer. Admis tous les trois en sa présence, le

  1. Même lettre, et lettre du dataire Giberto, du 10 juin 1526. — Lettere di principi, t. Ier, p. -194, V°.
  2. Lettre de Nic. Raince à François Ier, du 12 juin 1526. — Mss. Béthune, vol. 8509, fol. 1er. — Lettre de Giberto, du 10 juin, p. 196 V°
  3. Lettre de N. Raince à François Ier, du 17 juin 1526. — Ibid., f° 41.
  4. Dans Lanz, Correspondes des Kaisers Karl V, t. Ier, p. 217.