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régulièrement la majorité des suffrages ; il appelle chacun par son nom, et celui-ci, après avoir prêté serment de vive voix et par écrit, se trouve investi du titre de membre de la chambre des communes. Même dans le cas d’une protestation présentée sous forme de pétition contre la validité d’une élection, le membre qui a prêté serment continue à jouir des prérogatives parlementaires jusqu’à ce que la chambre ait, s’il y a lieu, statué contre lui, et pour présenter des pétitions de cette nature il est accordé quinze jours à dater de l’ouverture solennelle de la session par la lecture du discours du trône.

Rien de plus simple que cette manière de procéder, ni de plus conforme à la dignité de la chambre élective que de lui laisser le soin de choisir son président ; rien de plus sensé que l’esprit qui l’inspire dans l’usage de son droit. Eh bien ! quelque réputation qu’aient pu mériter jadis les élections anglaises, le même désir d’impartialité, la même facilité des opérations, la même bonne volonté dans les rapports individuels qui président à la constitution des chambres sont aujourd’hui les traits caractéristiques des élections qui se font en Angleterre ; seulement il ne faut pas vouloir oublier qu’au lieu de se passer entre quelques gentlemen qui sont l’élite de la société, les choses touchent et remuent toute une nation de 32 millions d’âmes, qu’elles se passent en public et presque partout en plein air, que, même sans être électeurs, les plus humbles se mêlent au mouvement avec autant d’ardeur que les autres. Avec ces données, il est impossible que sur quelques points du territoire et au milieu de la fermentation générale il ne se commette pas quelques-unes de ces irrégularités dont les vaincus s’empressent et souvent ont le droit de tirer parti ; mais combien sont-elles rares par rapport au nombre des élus, qui est de 658, et surtout combien légères par rapport à ce qu’en pareille occurrence on voit dénoncer en d’autres pays ! Dans l’étude que nous voudrions faire ici des graves questions de politique intérieure ou extérieure que le nouveau parlement est appelé à discuter ou à résoudre, on ne s’étonnera pas sans doute de nous voir insister au début sur ce caractère particulier des élections anglaises ; ce sera en même temps indiquer dans quelles conditions salutaires créées par les institutions et les mœurs se renouvelle et se retrempe à certaines époques la puissance vitale du parlement anglais.


I

Quoi que l’on en dise souvent encore sur la foi de récits surannés, les élections anglaises d’aujourd’hui ne sont pas des occasions de désordre ; loin de là, elles ne portent que des fruits utiles