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Clément VII, pontife suprême et pasteur très vigilant, il a résolu de tout tenter afin de pourvoir au salut et à la sécurité de la république chrétienne et d’établir entre les princes chrétiens une paix vraie et stable[1]. » En effet, aussitôt après la délivrance de François Ier, le pape dépêcha vers lui en qualité de nonce le chevalier Capino de Capo, chargé de le féliciter et muni des pouvoirs nécessaires à la conclusion d’une étroite alliance. De son côté, le doge de Venise, André Gritti, envoya sur-le-champ en France messer André Roberto, secrétaire de la république, avec des instructions semblables et pour la même fin.

Les deux négociateurs italiens trouvèrent François Ier à Cognac. Il y était avec les princes du sang, les grands-officiers de la couronne, les membres de son conseil, beaucoup de grands seigneurs du royaume, et il y tint quelque temps sa cour. Le chancelier Duprat restait son principal ministre. Par le zèle de ses services durant la régence de la duchesse d’Angoulême, il avait conservé la confiance du roi, dont le maréchal de Montmorency et Chabot de Brion avaient acquis toute la faveur par leur fidèle et agréable dévouement pendant sa captivité. Aussi ce prince, en reprenant l’exercice de l’autorité royale, avait-il donné au maréchal de Montmorency et à Chabot de Brion les deux charges de grand-maître de sa maison et d’amiral de France, vacantes depuis un an par la mort de son oncle le bâtard Jacques de Savoie et de son favori Bonnivet, tués l’un et l’autre à Pavie.

François Ier accueillit avec joie le nonce du pape et l’envoyé du doge[2]. Il adhéra bien vite à leurs propositions, non moins conformes à ses désirs que profitables à ses intérêts. Pendant que le vice-roi de Naples et l’ambassadeur Louis de Praet lui adressaient les plus vives instances pour qu’il exécutât les clauses onéreuses du traité de Madrid, ses plénipotentiaires réglaient avec les plénipotentiaires italiens les avantageuses stipulations du traité de Cognac. Ce traité fut signé le 22 mai 1526, et reçut le nom de sainte ligue. Il était conclu entre le souverain pontife Clément VII, le roi très chrétien François Ier, la république de Venise, la république de Florence, le duc de Milan Francesco Sforza, à l’instigation du roi d’Angleterre[3], qui en était déclaré le protecteur et donnait à espérer qu’il en ferait partie, et il y était laissé place pour l’empereur et les autres princes de l’Europe.

  1. Dumont, Corps diplomatique, t. IV, première partie, p. 451,
  2. « Quo factum est, ut (christianissimus rex) læta facie ac prompto animo hanc rem per dictos nuncios sibi tam facilo persuasam habuerit. » Ibid., p. 451.
  3. Dans une lettre du 9 octobre, le cardinal Wolsey dit à Henri VIII que la ligue a été entreprise par ses conseils : « Your highness, by counsalle this liege bean begon. » State Papers, t. Ier, p. 180.