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une population de 126,347 habitans, dépense annuellement pour l’instruction primaire 268,000 francs ou 2,12 fr. par tête, et Liège, avec 103,886 habitans, 271,000 fr. ou 2,61 par tête. En outre, depuis une dizaine d’années, Gand a consacré à la construction de ses écoles 514,000 fr. et Liège 1 million. Si l’instruction ne se répand pas davantage, il faut donc en imputer la faute à l’apathie du peuple et non à l’indifférence des pouvoirs publics. C’est pour ce motif qu’en Belgique la proclamation de l’enseignement obligatoire serait plus utile, plus nécessaire encore qu’ailleurs.

La Suisse, grâce à cette mesure, est avec l’Amérique du Nord le pays où l’instruction est le plus répandue et où elle donne les résultats moraux, politiques et commerciaux les plus frappans. C’est grâce à la diffusion générale des lumières que ce pays peut supporter le régime le plus démocratique et concilier la pratique de toutes les libertés avec l’exercice du suffrage universel, conciliation qu’ailleurs on déclare impossible. La Suisse n’a ni flotte, ni ports ; tous les produits exotiques dont elle a besoin doivent supporter d’énormes frais de transport ; il lui manque et le fer et la houille, ces élémens indispensables de l’industrie moderne, et cependant le chiffre de son commerce extérieur, relativement à sa population est plus élevé que celui de tout autre pays, même que celui de l’Angleterre. Comment l’emporte-t-elle dans la lutte économique malgré tant de désavantages ? Par l’habileté de ses ouvriers, par l’intelligence de ses industriels et de ses commerçans, c’est-à-dire par la supériorité des lumières.

En Suisse, l’instruction est obligatoire partout, sauf dans les trois petits cantons de Schwytz, d’Uri et d’Unterwalden, habités par des pâtres, et dans le canton de Genève, où cette mesure semble inutile. Sous peine d’amende et de prison, les parens sont obligés d’envoyer leurs enfans à l’école ou de leur donner l’instruction chez eux, et dans ce cas ils n’en doivent pas moins la rétribution scolaire, comme au Canada. L’âge où l’enfant est tenu de fréquenter l’école varie : il s’étend de 6 à 12 ans dans le canton de Bâle, de 6 à 15 dans la plupart des autres cantons. Le canton et la commune s’entendent pour entretenir l’école primaire. Quand la commune est trop pauvre, elle obtient un subside, surtout quand il s’agit d’une dépense extraordinaire de construction ou d’agrandissement. Tous les cantons affectent à cet objet des sommes importantes, qui s’élèvent en moyenne à 1 franc par tête[1]. Il faut bien remarquer que ce franc par

    haute intelligence à réorganiser l’enseignement primaire dans la ville dont il était échevin.

  1. Zurich donne 418,430 francs pour 206,265 habitans, ou 2 francs par tête ; Berne, 443,108 francs pour 467,141 habitans ; Soleure, 76,116 francs pour 65,263 habitans ; Vaud, 117,173 francs pour 213,157 habitans ; Neuchatel, 133,000 francs pour 87,365 habitans.