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écrivirent Bourbon et Lannoy à Charles-Quint, les a trouvées bien difficiles[1]. » Cependant il déclara s’en remettre à la régente, et par le retour de Beaurain il écrivit à l’empereur : « J’ai mandé à madame ma mère la résolution de ce qu’il me semble qu’elle doit faire pour ma délivrance, vous suppliant la vouloir recevoir et juger en cour d’empereur qui désire plutôt se faire honneur que me faire honte[2]. »

Il ne semblait disposé à aucune concession humiliante ou funeste. Ayant appris la ferme contenance et le fidèle dévouement de tous les habitans de son royaume, il leur en avait, de Pizzighetone, exprimé sa vive satisfaction. « Entre tant d’infélicités, leur disait-il, je n’ai reçu nul plus grand plaisir que sçavoir l’obéissance que portez à Madame en vous montrant loyaux sujets et bons François, la vous recommandant toujours et mes petits enfans, qui sont les vôtres et de la chose publique[3]. » Il ajoutait qu’en continuant ainsi ils donneraient à ses ennemis beaucoup plus l’envie de le délivrer que de lui faire la guerre. Il finissait cette lettre à ses sujets, qu’il appelait ses amis, par des déclarations admirables de sentiment et de langage. « Comme pour mon honneur et celui de ma nation, leur disait-il, j’ai plutôt élu l’honnête prison que la honteuse fuite, soyez sûrs qu’il ne sera jamais dit que, si je n’ai été si heureux de faire le bien à mon royaume, pour envie d’être délivré, j’y fasse mal. » Il affirmait qu’il aimerait mieux rester toute sa vie en prison que de causer un détriment à son pays.

Néanmoins, à la persuasion du vice-roi de Naples, qu’il appela auprès de lui, il offrit bientôt des concessions qui ne s’éloignaient pas beaucoup des exigences de l’empereur. Il proposa d’épouser la reine Éléonore, sœur de Charles-Quint, et de faire épouser l’infante Marie sa nièce au dauphin. Il demanda que le différend relatif au duché de Bourgogne fût soumis à la décision de la justice. Si le duché était reconnu appartenir à l’empereur, il le lui restituerait. Sinon, il serait donné en dot à la reine de Portugal, et les enfans mâles que le roi aurait de son mariage avec elle en hériteraient. Dans le cas où elle mourrait sans enfans mâles, le second fils de l’empereur y succéderait, et à défaut il reviendrait au second fils du roi, qui se marierait avec une fille de l’empereur. Rien de cela ne se réalisant, le duché de Bourgogne devait retomber en la pos-

  1. Lettre du duc de Bourbon et du vice-roi de Naples Lannoy à l’empereur, du 26 avril. 1525. — Archives impériales et royales de Vienne.
  2. Aux Archives des Affaires étrangères de France, correspondance d’Espagne, 1525-1529, fo 285 ro.
  3. Lettre de François Ier à ses sujets. L’original dans Béthune, ms. Vol. 8505, fo 1er  ; imprimée dans Captivité, etc., f. 159,160.