principale céréale et le fond de la nourriture de ses sauvages habitans, des tribus farouches, ignorantes, superstitieuses, sans cesse en guerre les unes contre les autres, vivant de pillage aux dépens des populations pacifiques et industrieuses des terres basses, tel était le peuple écossais jusqu’à la fin du XVIIe siècle. Cent ans après, tout est changé. Sur ce sol ingrat, fécondé maintenant par le travail le plus intelligent, on trouve une nation morale, prospère, religieuse, tolérante, éclairée, et très supérieure sous ce rapport aux Anglais, — qui jadis méprisaient leurs barbares voisins, — les égalant dans le commerce et l’industrie, les surpassant dans l’agriculture. « Partout où un Écossais se trouve placé, remarque M. Biot dans son curieux livre sur l’enseignement primaire en Écosse, l’instruction qu’il a reçue dans les écoles paroissiales donne à son esprit un tour particulier d’observation, et lui permet de s’étendre fort au-delà du cercle d’objets qui occupe l’attention des personnes de ces mêmes classes qui n’ont point été ainsi élevées. » On parlait à Londres de l’Écossais du XVIIe siècle comme des Esquimaux, dit Macaulay. L’Écossais du XVIIIe siècle fut considéré, non plus avec mépris, mais avec envie. On se plaignait que partout il l’emportait sur les autres. Mêlé aux Anglais et aux Irlandais, ii s’élève au-dessus d’eux, disait-on, comme l’huile surnage au-dessus de l’eau. D’où venait cette prodigieuse transformation ? De l’influence de l’école presbytérienne, obligatoirement soutenue par l’argent de la commune. C’est sans contredit un des plus mémorables exemples de l’action qu’exerce la diffusion des lumières sur la moralité et le bien-être des nations.
Si c’est à l’Écosse que l’Angleterre doit emprunter le principe de l’école communale, c’est à l’Irlande qu’elle doit prendre celui de l’école laïque. Jusqu’à la fin du siècle dernier, l’Irlande avait été plongée dans une ignorance complète. La raison principale en était facile à découvrir. La très grande majorité des habitans était catholique, et un statut de Guillaume III interdisait à tout catholique le droit d’enseigner. En 1781, ce statut fut aboli, et en 1793 le parlement irlandais encouragea directement l’enseignement populaire par des subsides. Il se fonda dès lors un assez grand nombre d’écoles mixtes où les enfans des protestans et des catholiques, assis sur les mêmes bancs pour apprendre à lire et à écrire, recevaient ensuite l’instruction religieuse des ministres de leur culte respectif. La grande enquête ouverte en 1806, et dont le rapport ne parut qu’en 1812, démontra qu’une éducation indépendante des sectes et commune à tous pourrait seule réussir. Les protestans, qui avaient la richesse et le pouvoir, n’auraient pas voulu soutenir de leur argent des écoles catholiques, et les catholiques, qui formaient