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de l’Italie avec Rome. La reprise des négociations qui donnèrent tant d’espérances il y a quelques mois deviendra impossible. D’un autre côté, l’esprit de la nouvelle chambre, où la gauche et le centre gauche occupent une plus grande place que dans l’ancien parlement, sera favorable à une politique décidée de sécularisation. On voit qu’il est impossible de lutter en Italie contre la force des choses. Les embarras que cause à ce pays la longue résistance hostile de la cour de Rome l’obligeront, à s’emparer des biens du clergé. Comment peut-on s’imaginer que cette œuvre de sécularisation, puissante comme la nécessité, s’arrêtera devant l’acte qui en est l’achèvement inévitable, la séparation des deux pouvoirs à Rome même ?

L’intéressante expérience qui se poursuit en Autriche est bien digne d’attirer la curiosité de l’Europe à côté des efforts d’organisation intérieure tentés par l’Italie. La politique inaugurée à Vienne par la patente de septembre demeure fidèle à elle-même et nous paraît continuer à mériter la confiance des esprits libéraux. Cette politique est évidemment bien accueillie dans les régions non allemandes de l’empire, en Hongrie, en Galicie, en Bohême ; Il serait fort heureux qu’elle fût sanctionnée par le travail des diètes provinciales. L’œuvre tentée est difficile assurément, puisqu’il s’agit de constituer l’empire en une sorte d’état fédératif. Les politiques de centralisation arrivent plus aisément à leurs fins immédiates quand elles ont la force ; la force, pour un moment du moins, supprime en effet les résistances. Au contraire l’établissement d’une fédération a besoin du concours de toutes les parties, et, au lieu de briser les volontés diverses, doit les attirer et les réunir par la persuasion. L’intérêt de cette tentative se concentrera dans les délibérations de la diète de Hongrie. Les Magyars sauront-ils se concilier ces parties annexes de leur vieille monarchie, la Transylvanie, la Croatie, auxquelles ils tiennent tant ? Quand ils auront accompli le travail de fusion qui les concerne, leurs arrangemens avec la cour de Vienne deviendront faciles. Avoir les choses à distance, il semble que l’on assiste à l’exécution progressive d’un plan convenu d’avance entre les divers acteurs. Les chefs hongrois, l’honnête et populaire M. Deak par exemple, doivent être d’accord avec M. de Mailath sur le système qui devra régir les rapporte de la Hongrie avec l’empire. Une fois que ce système aura été adopté, la reconstruction fédérative de l’Autriche sera bien avancée. C’est alors que l’on pourra dissiper les craintes exprimées par les provinces allemandes et apaiser leur mécontentement. L’opposition libérale des provinces allemandes a paru croire que la politique nouvelle équivalait à l’abandon du système constitutionnel en Autriche. Nous croyons le contraire. Puisqu’il s’agissait de vaincre par la persuasion le long dissentiment de la Hongrie, il fallait bien suspendre la constitution qui était la pierre d’achoppement du patriotisme hongrois ; mais, après avoir gagné l’adhésion de la Hongrie, toutes les institutions provinciales définitivement arrêtées devront se coordonner dans une constitution générale de l’empire où les