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veille, mais nos projectiles, dont les traces sillonnent la crête de ces solides parapets, ont dû rendre la batterie intenable pour les servans. Ces pièces ont été enclouées la veille au soir ; on achève de les mettre hors de service en brisant les écouvillons, les vis de pointage et en jetant les coins de mire à la mer. Pendant ce temps, les marines, les hommes du contingent anglais, en couronnant le mamelon boisé, ont refoulé quelques groupes de fantassins japonais qui se replient en tiraillant dans une vallée située en arrière. Cette vallée est calle qui vient aboutir à la mer, au pied des batteries. La colonne, traversant la rizière et un petit cours d’eau qui en occupe le fond, pénètre de l’autre côté dans une batterie rasante de neuf pièces de divers calibres : c’est, au dire des capitaines des corvettes, l’ouvrage qui leur a donné le plus de mal la veille au soir. Ces neuf pièces sont également mises hors d’état de servir. Pendant qu’un détachement de nos hommes opère ce travail, quelques boulets, lancés du haut de la vallée par un ennemi invisible, viennent tomber dans l’ouvrage. Sur ces entrefaites, les amiraux décident que le corps des marins-fusiliers anglais demeurera, sous les ordres du capitaine de vaisseau Alexander, pour occuper les trois batteries de la vallée, tout en travaillant à les détruire, et que le reste des forces, sous les ordres du capitaine de vaisseau Du Quilio, se portera le long de la mer du côté de Simonoseki. Les marins-fusiliers français, suivis des Hollandais, s’engagent dans la route qui suit le bord de la mer, tandis que les marines marchent parallèlement dans les bois. Le long de la plage, les chaloupes de débarquement, armées en guerre, suivent le mouvement.

Les colonnes se trouvent alors sur les flancs d’une montagne boisée qui fait suite à la vallée. Cette montagne se termine, au bord de la mer, par des falaises au sommet desquelles serpente la route suivie par nos hommes. Rien n’est pittoresque comme cette route étroite comme tous les chemins du Japon, tantôt suspendue au-dessus de la plage, tantôt s’enfonçant sous un dôme de verdure. L’ennemi, qui ne se montre pas, a abandonné deux mortiers, que l’on trouve en batterie sur la falaise. Au-dessus de nous, les marines, cheminant sur les flancs de la montagne, s’avancent également sans obstacle ; on ne trouve plus trace des tentures de guerre aux armes de Nagato, qui ont été enlevées pendant la nuit.

A dix heures et demie, les deux colonnes arrivent simultanément à l’entrée de la grande batterie. Il y a peu de minutes que l’ennemi l’a définitivement évacuée, car, pendant la marche des colonnes sur la montagne, un dernier coup de canon isolé a été envoyé sur le mouillage des corvettes. Les Japonais se sont repliés sur la ville et dans les bois, d’où ils entretiennent, sans se