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nœuds, ce qui rend fort délicate la manœuvre de nombreux bâtimens destinés à prendre un poste et à s’embosser sous le feu de l’ennemi. Il est donc décidé que la marche en avant n’aura lieu qu’à l’heure où le courant, sortant du détroit, deviendra contraire. Cette circonstance oblige à différer le mouvement jusqu’à deux heures du soir le lendemain.

Les conjectures relatives aux dispositions pacifiques de la province de Bouzen se trouvèrent justifiées. Vers huit heures du soir, les gouverneurs de la petite ville de Tanaoura se rendaient à bord de la Sémiramis. Se doutant des préparatifs d’attaque des divisions alliées, ils venaient assurer l’amiral de leurs dispositions pacifiques. « Nous avons, dirent-ils, quelques forts et canons sur notre côte ; mais ils n’ont d’autre but que notre protection, nous espérons qu’on voudra bien les épargner. » On s’empressa de les rassurer à cet égard. Ils parurent assez mal informés relativement aux dispositions de leurs voisins, et se retirèrent après avoir déploré en termes généraux les malheurs de la guerre.

La nuit se passa sans incident particulier. Un canot, parti de la côte de Nagato, s’était présenté la veille au soir le long de l’Euryalus ; un officier, évidemment de grade inférieur, qui le montait, avait demandé à parler au vice-amiral anglais ; il lui fut répondu qu’on ne parlementerait qu’avec des officiers d’un rang suffisamment élevé et dûment accrédités par le prince de Nagato. Le messager s’éloigna.

Dans la matinée du 5, l’on ne put remarquer, vu l’éloignement assez grand du mouillage, aucun mouvement particulier dans les batteries ennemies. Vers midi, les bâtimens de la première division allumèrent les feux et firent leurs préparatifs : les mâts de perroquet furent calés ; le reste des bâtimens suivit bientôt cet exemple. Le changement de flot attendu avec impatience ne se fit sentir que vers les deux heures. Une demi-heure après, les six bâtimens de la première division défilaient lentement entre nous et l’Euryalus dans l’ordre qui leur avait été assigné. C’était d’abord la corvette anglaise le Tartar, puis le Dupleix, commandant Pasquier de Franclieu, la corvette hollandaise le Metal-Cruis, la corvette anglaise la Barrossa, la corvette hollandaise Djambi, enfin la frégate à roues Léopard. Tous ces navires étaient en branle-bas de combat. Peu de minutes après, ils mouillèrent à leur poste, tandis que l’ennemi, dont ils étaient à bonne portée, restait silencieux dans ses batteries. Pendant que les corvettes se disposaient à s’embosser, opération que rendait difficile la force du courant, la seconde division des bâtimens légers appareillait pour se rapprocher de Kousi-saki. Elle se. composait des navires anglais Perseus, Coquette,