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furent échangés, et l’on se sépara quelques momens après en apparence dans les meilleurs termes.

A quelques jours de là, le 30 mars, les représentans s’assemblaient à Yokohama sous l’impression de ces derniers incidens et des récentes nouvelles arrivées de l’intérieur. Le rôle du prince de Nagato dans les agitations intestines du Japon paraissait être plus important qu’on ne l’avait cru tout d’abord. De nouveaux renseignemens permettaient d’expliquer nettement son attitude dans les événemens de 1863. Parvenu à une haute faveur auprès de la cour de Kioto au moyen d’intrigues, de sommes d’argent, et aidé aussi par une vieille réputation de patriotisme, le prince était, au commencement de 1863, arrivé à ses fins : il avait obtenu un décret d’expulsion contre les étrangers et en même temps le titre de défenseur du pays, avec la tâche de faire exécuter le décret. Ce décret avait été rendu malgré les efforts de la cour de Yédo, malgré ceux des daïmios qui, sans être les alliés de cette cour ni les amis des étrangers, envisageaient avec plus ou moins de crainte les conséquences de cette politique désespérée. Le taïkoun avait été mandé à cette époque à Kioto pour expliquer sa conduite ; il y avait couru de sérieux dangers, dont ses partisans l’avaient garanti à grand’peine ; mais son pouvoir chancelant ne semblait plus attendre qu’un choc pour s’écrouler. Depuis cette époque, l’affaiblissement du prestige ou de la bonne volonté du gouvernement de Yédo s’était traduit par des symptômes alarmans. Sentant la nécessité pressante d’être définitivement fixé sur ses résolutions, les ministres s’entendirent pour lui adresser chacun, à la suite de la conférence du 30 mars, une note identique. Rappelant d’abord ce gouvernement à la satisfaction des demandes de leurs prédécesseurs, restées sans réponse depuis le mois de juillet 1863[1], la note exigeait des explications définitives, et de plus le retrait formel de la demande d’évacuation de Yokohama.

Comme il était probable que cette tentative de conciliation n’aurait pas un meilleur effet que les précédentes, sir R. Alcock se préoccupa en même temps d’assurer l’exécution des résolutions déjà presque, convenues. Il fit venir de Hong-kong à Yokohama le 20e régiment de ligne, que le gouvernement britannique avait mis à sa disposition pour le cas où la gravité des événemens motiverait son envoi au Japon. À cette même époque, un bataillon de soldats de marine, demandé dès l’année précédente par le vice-amiral Kuper, venait d’arriver sur le vaisseau Conqueror, après avoir été dirigé un moment sur la Nouvelle-Zélande. Les nouvelles arrivent

  1. Voyez la Revue du 1er mars 1865, p. 133.