Page:Revue des Deux Mondes - 1865 - tome 59.djvu/771

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

grand bâtiment destiné aux écoles populaires, et qui coûtera plus de 1 million de francs. La municipalité se propose d’en construire d’autres pour satisfaire aux besoins d’une ville où chaque année s’augmente le nombre des élèves. Ces faits et ces chiffres prouvent d’une manière éclatante avec quel zèle et quelle persévérance les autorités de la ville de Milan travaillent à assurer le bien être moral de la population, ainsi que l’empressement avec lequel les Milanais profitent des moyens d’instruction qui leur sont offerts.

Je ne me suis pas contenté de lire les rapports adressés à la municipalité milanaise sur les écoles populaires : j’ai voulu voir de près cette œuvre de civilisation, et la toucher pour ainsi dire de la main. Grâce à l’obligeance de l’un des membres de la commission des études, j’ai pu visiter plusieurs des école3 élémentaires de garçons et de jeunes filles, et aussi deux ou trois des écoles du soir. Je suis resté deux, trois et quelquefois même quatre heures dans chaque école, entendant lire et voyant écrire, assistant à l’enseignement de la grammaire et de la géographie, examinant moi-même de vive voix les diverses classes dans ces différentes branches de l’instruction populaire. J’ai été très satisfait de l’état général des écoles, du progrès, de l’ordre et de la bonne tenue des élèves. J’ai dû même à l’obligeance d’une inspectrice de pouvoir visiter à deux reprises une école des jours de fête, et là encore je n’ai pu qu’admirer l’attention soutenue avec laquelle les élèves profitaient de l’occasion qui leur était donnée de s’instruire.

Ce n’est pas la municipalité seulement, c’est l’élite de la société milanaise qui prête son concours au développement de l’instruction populaire. Une telle intervention des familles riches de Milan est excellente en elle-même, c’est aussi un témoignage très favorable de l’état actuel du pays et le gage des espérances que l’on peut fonder sur l’avenir, car il est évident que si elles s’intéressent ainsi aux pauvres, elles comprendront de mieux en mieux les désirs et les besoins des classes ouvrières, et que les pauvres de leur côté seront naturellement portés de plus en plus à regarder leurs concitoyens riches avec de bons sentimens et à s’affranchir de toute défiance. Les diverses classes de la société s’uniront ainsi par le lien durable d’une mutuelle affection. Les pauvres comme les riches se sentiront membres du même corps, enfans de la même patrie, et la nation se trouvera plus forte, plus capable de se développer au dedans, par conséquent mieux en état de résister aux ennemis du dehors.

Quel que soit pourtant l’intérêt qui s’attache au progrès moral réalisé à Milan grâce à la liberté, il n’en faut pas moins rechercher ce qui a été fait pour le progrès matériel. Un premier symptôme qui