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Michelozzo Michelozzi, l’auteur de cette charmante figure digne de Donatello lui-même, — le Saint Jean-Baptiste enfant, qui orne la porte d’une maison sur la place du Dôme à Florence, — ni Nanni di Banco, dont Donatello a plus d’une fois retouché les ouvrages, — ni Antonio Filarete, ni les autres sculpteurs appartenant à la même génération. Encore moins l’exception se rencontrera-t-elle parmi les disciples qui, en étudiant sous les yeux du maître, en l’aidant chaque jour dans ses travaux, ont appris à se pénétrer de sa doctrine et à s’approprier, quant à la pratique, une partie de ses secrets. Tous au contraire restent jusqu’à la fin de leur vie fidèles aux traditions qui avaient nourri leur jeunesse, et si les deux plus éminens d’entre eux, Desiderio da Settignano et Verocchio, réussissent parfois à perfectionner les moyens d’expression transmis, si le tombeau de Carlo Marsuppini dans l’église de Santa-Croce à Florence, le tombeau de Pierre et de Jean de Médicis dans la vieille sacristie de Saint-Laurent, enchérissent à quelques égards sur l’élégance des monumens qui leur avaient servi de modèles, toujours est-il qu’ici encore les innovations introduites par Donatello s’accusent clairement et se perpétuent.

Un autre progrès d’un ordre plus matériel, plus strictement technique, résulte des calculs en vertu desquels Donatello soumettait l’exécution de chaque travail non-seulement aux formes données par l’architecture, mais à la distance entre la place qu’occuperait ce travail et celle où se trouverait le spectateur. Avant lui, on l’a vu, les sculpteurs qui opéraient sur les murs mêmes d’un monument n’avaient garde de négliger une condition de succès aussi essentielle, et, pour ne rappeler que cet exemple, les bas-reliefs de la cathédrale d’Orvieto, plus largement traités à mesure qu’ils s’éloignent de la base de l’édifice, prouvent qu’on a spéculé en les faisant sur les phénomènes de l’optique ; mais, soit science incertaine chez les artistes, soit excès de scrupule dans l’exécution, il n’en allait pas ainsi des statues sculptées en dehors des monumens qu’elles devaient décorer. Que les niches qui les attendaient fussent à quelques pieds au-dessus du sol ou dans le voisinage de l’entablement, la manière de procéder ne variait guère. Aussi bon nombre de ces statues, perdues autrefois pour les regards à la hauteur où elles avaient été reléguées, ont-elles reçu dans les musées une hospitalité aussi bien justifiée en apparence que la place faite à tels morceaux de moindres dimensions, à telles figures ayant orné primitivement l’intérieur d’une chapelle ou les appartenons d’un palais.

Les statues monumentales dues au ciseau de Donatello ne sauraient impunément quitter leurs places. C’est précisément parce qu’elles produisent un effet excellent là où nous les voyons, qu’elles nous causeraient ailleurs une impression toute différente. Que de-