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pas la faute de ceux qui les ont instituées. Pour les faire accepter par les gens sérieux, les turfistes ont prétendu qu’elles nous viennent des Grecs, qui se disputaient, comme on sait, les prix des courses en char aux jeux olympiques. Sans trop s’arrêter à cette origine classique, on peut considérer Jacques Ier comme le véritable fondateur des courses modernes, car vers 1603 il organisa celles de Newmarket, de Croydon, etc. Ces courses n’étaient qu’un simple amusement et une occasion de paris ; les prix étaient peu considérables et consistaient le plus souvent en objets de peu de valeur, tels qu’une cravache, une sonnette en or, etc. Le premier prix en argent fut de 100 livres ; c’est Charles II qui l’institua. Plus tard, la reine Anne en fonda un autre de 150 liv. (3,750 fr.). L’art d’entraîner et d’élever des chevaux spéciaux n’existait pas alors ; on se procurait comme on le pouvait les animaux qui paraissaient les meilleurs, c’est-à-dire les plus vigoureux et les plus rapides, car alors les courses étaient longues (de 6 à 7 kilomètres) et les poids considérables (de 60 à 75 kilogrammes). Et comme les meilleurs chevaux connus à cette époque étaient les arabes, c’est d’Arabie et de Turquie qu’on en fit d’abord venir. Charles II y envoya, même son écuyer Christophe Wirville, accompagné de George Ferwick, pour lui acheter des étalons et quatre jumens connues sous le nom de jumens royales (royal mares) qui donnèrent le jour aux chevaux les plus célèbres du siècle dernier.

Toutefois la véritable souche des chevaux de course peut être ramenée à trois chevaux orientaux : le turc Beyerley, dont on ne sait autre chose sinon qu’il a été le cheval de guerre du capitaine Beyerley en 1689 ; l’arabe Darley (Darley arabian), importé par M. Darley du Yorkshire vers 1712 ; enfin l’arabe Godolphin (Godolphin arabian), importé quelques années après par lord Godolphin, qui l’avait, dit-on, rencontré sur le Pont-Neuf à Paris, attelé à une voiture de porteur d’eau. Étrange vicissitude ! Partir de si bas et monter si haut qu’aujourd’hui c’est pour un cheval un titre à l’estime publique que d’appartenir à la descendance de Godolphin ! Ses mérites ne furent cependant pas immédiatement appréciés à leur valeur, car on lui fit faire pendant quelque temps l’ignoble métier de boute-en-train ; mais un jour, par suite d’un défaut de surveillance, il prit son rôle au sérieux, et le résultat en fut si satisfaisant qu’à partir de ce moment il fut promu au grade de reproducteur en titre.

Dès cette époque en effet, on avait remarqué que les parens transmettaient à leurs produits la vigueur et la vitesse qui les distinguaient eux-mêmes, et naturellement on voulut accoupler les sujets qui réunissaient ces qualités au plus haut point ; l’on eut soin aussi de tenir un registre de toutes les naissances. Telle est l’origine de la race anglaise pur sang. Cette création fut le résultat non de