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mouvoir. On dit alors qu’il plane. Comment l’oiseau plane-t-il ? Il se donne d’abord par quelques battemens une grande vitesse horizontale ; puis, laissant ses ailes déployées, il s’avance, légèrement incliné de la gorge à la queue : la résistance que l’air oppose à sa progression produit une composante ascendante qui peut équilibrer son poids, ou même le surpasser. Dans ce dernier cas, l’oiseau monte ; on voit alors sa vitesse s’épuiser assez rapidement, et s’il veut s’élever encore, il est bientôt obligé de battre des ailes pour se donner une nouvelle impulsion. S’il consent à redescendre, il profité du travail qu’il vient de produire en s’élevant ; changeant le sens de son inclinaison, il se présente légèrement penché d’arrière en avant ; la résistance de l’air lui fournit ainsi une composante horizontale dans le sens de son mouvement, et l’on voit sa vitesse s’accroître jusqu’au moment où il veut arrêter sa descente. Cette vitesse acquise peut être utilisée à son tour pour un nouveau mouvement d’ascension, moins étendu naturellement que le premier. C’est ainsi que l’on voit de grands oiseaux s’avancer rapidement les ailés immobiles, monter et descendre successivement en changeant l’inclinaison de leur corps, et prolonger cette manœuvre pendant deux ou trois minutes, jusqu’au moment où leur vitesse épuisée les oblige à donner de nouveaux coups d’aile. Au reste, cette manière de voler n’est pas seulement propre aux oiseaux de forte taille, on peut l’observer chaque jour chez les humbles passereaux ; mais chez ceux-ci l’élan initial produit peu d’effet : ils donnent huit ou dix coups d’aile précipités, montent un peu, descendent presque tout de suite, et recommencent de nouveaux battemens. On les voit suivre ainsi une ligne sinueuse à courtes ondulations.

Les organes qui servent à la locomotion de l’oiseau sont en définitive merveilleux, et il en tire un parti excellent ; mais, si bien organisé que soit ce moteur, il lui faut, pour suffire au travail considérable qu’il doit produire, un foyer où se produise une active combustion. Or c’est une condition à laquelle se prête admirablement la constitution physiologique de l’oiseau. Voilà ce que nous avons surtout à cœur de montrer, car c’est là ce qui lui donne sur l’homme une supériorité que celui-ci ne peut racheter par aucun mécanisme. Tout le monde sait aujourd’hui dans quel réservoir un animal puise son énergie musculaire : produire un effort, c’est transformer en travail la chaleur due à la respiration. Les progrès que la thermo-dynamique a faits depuis quelques années ont mis cette vérité en pleine lumière[1]. L’animal sera donc capable d’un travail d’autant plus

  1. Voyez à ce sujet, dans la Revue du 1er mai 1863, une étude sur l’équivalence de la chaleur et du travail mécanique.