Page:Revue des Deux Mondes - 1865 - tome 59.djvu/257

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

politique en suivant chacune les procédés qui lui sont propres. On peut considérer l’Italie comme n’ayant encore à s’occuper pendant longtemps que des questions intérieures. Ce ne sont aussi que des questions de cette nature qui excitent en ce moment en Italie un certain émoi. Il y a d’abord l’affaire des élections générales, qui auront lieu au mois d’octobre, des tiraillemens ministériels et une crise de cabinet, le tapage que fait la circulaire adressée aux chefs de corps par le général Petitti. Ce dernier document a créé en Italie une sorte de conflit entre la presse et l’armée. Le ministre de la guerre, ému par les attaques dirigées par un journal contre les sévérités imputées à un colonel, s’est laissé aller à un mouvement de susceptibilité militaire, et a fait appel en termes un peu vifs à l’esprit de corps de l’armée. La circulaire ministérielle a été suivie de quelques manifestations militaires qui semblaient hostiles à la presse et de violentes récriminations des journaux du parti avancé. C’est un conflit regrettable où des deux côtés on peut avoir manqué de prudence et de modération, mais, qu’il serait absurde de vouloir éterniser en l’envenimant. On peut adresser aux organes importans de la presse en Italie l’éloge que les Italiens ont mérité depuis leur émancipation : ils ont montré un véritable esprit politique. Nous espérons que l’esprit politique ne les abandonnera point en cette circonstance. C’est un des plus difficiles problèmes politiques des temps modernes que de faire vivre des institutions libres avec de grandes armées permanentes. Pour réussir dans cette conciliation de l’esprit militaire et de la liberté, il faut une adresse et un bonheur que la France elle-même n’a pas toujours possédés. L’Italie a besoin d’avoir une armée, et il n’y a pas d’armée sans esprit militaire. L’armée est la condition de l’indépendance future de l’Italie. Contre un retour offensif de l’Autriche, les journaux auraient malheureusement moins d’efficacité que des soldats et des officiers animés d’un vigoureux esprit militaire. La presse italienne doit donc respecter avec une patriotique sollicitude tout ce qui touche aux sentimens d’honneur et à l’esprit de discipline de l’armée. Les organes élevés de la presse comprennent cela en Italie, et ils ne consentiront point à soulever un funeste antagonisme entre les libertés, — qui sont la garantie intérieure, — et l’armée, — qui est la garantie extérieure de l’indépendance nationale. Peut-être cet incident eût-il excité une animosité moins vive si l’on n’eût été à la veille des élections, et si l’on n’eût cherché dans la circulaire du général Petitti une arme de parti. Nous ne pensons point que les élections qui vont avoir lieu puissent être pour l’Italie une épreuve difficile. Il n’y a eu parfois de dissentimens graves dans la péninsule qu’entre le parti d’action et le parti modéré, qu’il ferait mieux d’appeler le parti politique. Les chances du parti d’action n’ont jamais été bien grandes dans le corps électoral ; l’immense majorité des électeurs italiens, appartient au parti politique. La situation générale de l’Europe diminue encore aujourd’hui les chances du parti d’action, à qui les événemens font défaut. Au sein de la majorité des politiques, il n’y a point