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finir, aujourd’hui plutôt que demain, avec cette attitude d’une puissance constitutionnelle cherchant des exemples dans l’histoire de Louis XIV pour entretenir des ambassadeurs auprès d’un roi fugitif, et renouvelant à l’égard de l’Italie les procédés de l’Europe du nord à l’égard de l’Espagne elle-même pendant la guerre civile. Pour les passions et les velléités absolutistes de toute nuance au contraire, cette abstention hostile où l’Espagne restait enfermée était une attestation permanente d’influence, un dernier moyen de reconquérir l’ascendant à l’intérieur : on l’a bien vu à leur déchaînement le jour où la question a été tranchée. Tant qu’elles ont gardé une espérance, elles se sont bornées à répéter : On n’osera ! Le jour où il n’y a plus eu de doute, elles ont fait explosion, elles ont proféré des menaces, elles ont juré, elles aussi, qu’elles n’obéiraient pas ; jusqu’au dernier moment, elles ont assiégé la reine, et peut-être ont-elles réussi un instant à l’ébranler. Si elles avaient triomphé et que le général O’Donnell se fût retiré, je ne sais trop ce qui serait advenu ; les idées absolutistes auraient peut-être vu le lendemain leur victoire écrite dans des ruines : de telle sorte que par elle-même et par les circonstances au milieu desquelles elle s’accomplit, cette reconnaissance de l’Italie est certainement Té pas le plus décisif que le libéralisme ait fait depuis quelques années en Espagne, — d’autant plus décisif qu’il a été plus disputé. Elle tranche du moins la situation, et scelle de ce côté la rupture du ministère avec la politique de réaction.

Quant à la réforme électorale, ce n’est pas d’aujourd’hui que la question s’est élevée entre les partis, que s’est révélée la nécessitée de chercher un milieu entre le système modéré, qui, en rétrécissant les districts, livre les élections au gouvernement, et le système progressiste du scrutin de liste, qui les livre aux hasards d’une direction arbitraire en annulant toutes les influences locales. La loi nouvelle que le gouvernement a été autorisé à établir a précisément la prétention de concilier les deux systèmes en les transformant, — en augmentant d’abord le corps électoral par une réduction du cens et en combinant ensuite quelque chose comme les bourgs d’Angleterre avec des circonscriptions d’un caractère moins local. Que vaudra cette loi à l’épreuve ? On le verra. Pour le moment, elle rompt avec un système visiblement usé ; elle change assez sensiblement les conditions de l’élection pour qu’il puisse sortir du scrutin un parlement moins prévu d’avance, composé d’élémens nouveaux, plus favorable peut-être à de nouvelles agrégations des partis. Au demeurant, le ministère du 21 juin 1865 a donc fait acte de vie en reconnaissant l’Italie, en réalisant une réforme électorale souvent réclamée et toujours ajournée, en accélérant d’un autre côté le désamortissement des biens ecclésiastiques, et ce sont ces