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naître, même avec son arbre généalogique sous les yeux et les explications minutieusement précises du nouvel historien de son plus remarquable rejeton. Qu’il suffise au lecteur de savoir que le jeune Laurence était l’arrière-petit-fils du docteur Richard Sterne, célèbre, pendant les guerres de la révolution, par son attachement au parti du roi, et qui mourut en 1683 archevêque d’York. Richard Sterne semble avoir porté vaillamment le poids d’une vie pleine de troubles. Il appartenait à l’université de Cambridge, lorsqu’éclata la querelle entre le roi et le parlement, et il se rangea hardiment et ostensiblement du côté des cavaliers. Il assista son patron, l’archevêque Laud, sur l’échafaud, envoya l’argenterie de l’université au camp de Charles Ier, et en fit tant qu’il s’attira l’animosité de Cromwell, fut encaissé à bord d’un navire avec d’autres théologiens de son parti, et courut un moment le risque d’être vendu comme esclave aux pirates algériens. Relâché après dix jours de souffrances sans nom, le docteur Sterne fut laissé libre de gagner sa vie comme maître d’école en attendant des jours meilleurs : ils arrivèrent avec la restauration, qui le fit d’abord évêque de Carlisle et enfin archevêque d’York. Il a été jugé avec sévérité par les théologiens du parti opposé au sien. L’oracle des presbytériens à cette époque, Richard Baxter, celui-là même qui soutint avec une si tranquille dignité les insultes de Jeffries dans les scènes de réaction qui signalèrent l’inauguration du règne de Jacques II, a parlé de lui en ces termes, où se réfléchit son caractère bien connu, à la fois doux et morose, mais qui cependant peuvent être pris comme un demi-éloge : « Parmi les évêques, il n’y en avait pas dont le visage promît davantage ; mais il n’avait pas la moitié de la charité qui convenait à un si grave prélat et d’un aspect aussi ascétique. » Plus amer que le jugement du docteur non conformiste est celui de l’évêque Burnet, le plus whig des anglicans de l’époque. « Sterne mourut, dit-il, dans sa quatre-vingt-sixième année. C’était un ecclésiastique d’acre et mauvais caractère, qui ne pensait qu’à l’enrichissement de sa famille. » Quoi qu’il en soit de ces jugemens, dictés en partie par l’animosité politique, les faits plaident en faveur de l’archevêque Sterne, et montrent en lui, sinon un grand zèle mystique, au moins une bienfaisance pratique qui s’accorde parfaitement avec ce que nous savons de son rôle public. Jeune, lorsqu’il n’était encore que master du collège de Jésus à l’université de Cambridge, l’usage des orgues commençant à s’introduire dans le service religieux, il avait fait don à son collège d’un de ces instrumens. Longtemps après, devenu archevêque, il se souvint de sa vieille université, et la gratifia d’une rente annuelle de 40 livres pour l’éducation de quatre étudians. On le voit encore contribuer à