Page:Revue des Deux Mondes - 1865 - tome 57.djvu/929

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LAURENCE STERNE
D'APRES SON NOUVEAU BIOGRAPHE

The Life of Laurence Sterne, by M. Percy Fitzgerald, 2 vol. in-8o ; London, Chapman and Hall 1864.

On a souvent agité la question de savoir quel était dans l’ordre littéraire et poétique le plus grand des hommes de génie, mais personne jusqu’à ce jour ne s’est encore avisé de retourner cette même question et de demander quel était le plus petit. C’est peut-être qu’en toute chose il est aussi facile de déterminer le point extrême de la grandeur que difficile de déterminer le point extrême de la petitesse. Quelques noms, trois ou quatre au plus, suffisent pour épuiser la liste de ceux qui se disputent le sommet de la montagne sacrée ; mais combien serait nombreuse la liste de ceux qui auraient le droit de s’en disputer la base ! Et cependant, peut-être par cela même que la liste est trop nombreuse, il est très difficile de choisir dans cette foule et de décider quel est l’infiniment petit, l’homme qui a été tout près de n’avoir pas de génie, celui après lequel le simple talent commence immédiatement, l’humble hysope qui, tout séparé qu’il soit du cèdre par une incommensurable distancé, n’en appartient pas moins à la même famille, et qui, dans les fentes du mur où sa faiblesse se cramponne, célèbre dans le même langage la beauté de la création divine. On peut nommer un Goldsmith, un Bernardin de Saint-Pierre, d’autres encore ; mais pour nous, si nous avions à citer un nom, c’est celui de Laurence Sterne que nous choisirions. Nous ne croyons pas que le microscope critique puisse découvrir au-delà de Sterne quelque chose qui ressemble