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RECITS
DE
L'HISTOIRE DE HONGRIE

UNE ARMEE FRANCAISE EN HONGRIE
BATAILLE DE SAINT-GOTHARD

La victoire de Saint-Gothard, remportée sur les Turcs en 1664, à quelques lieues de Vienne, par les Français et les impériaux, est un des plus glorieux épisodes de notre histoire militaire au XVIIe siècle, et pourtant c’est à peine si elle a obtenu quelques lignes dans nos histoires générales. Cette apparition soudaine de la France dans les plaines lointaines du Danube, cette alliance d’un jour avec la maison d’Autriche, entre les rivalités de la veille et celles du lendemain, a semblé à nos historiens un démenti inexplicable de la politique traditionnelle de notre pays. Le récit de ces événemens s’encadrait mal d’ailleurs dans une histoire générale, il détournait l’attention du lecteur et troublait l’ordonnance de l’œuvre. C’est à peine si l’on daigné mentionner en passant ce grand combat qui sauva la chrétienté : nos annalistes les plus exacts en ignorent les détails et commettent les plus étranges méprises[1]. Ainsi méconnus chez

  1. Le président Hénault par exemple affirme que le commandant en chef des troupes françaises, Coligny, qui paya si vaillamment de sa personne et décida du succès de cette journée, n’assistait pas au combat et se trouvait malade à Vienne. Ce qui est plus étrange, c’est que plusieurs des contemporains et des amis de Coligny se trompaient également sur ce point. Bussy, son cousin, raconte que « non-seulement on ne lui donne point l’honneur de cette action, comme cela se pratique d’ordinaire, mais qu’on le condamne un peu de ne s’y être pas trouvé. » — Mémoires, t. II.