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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.



14 mai 1865.

La partie peut-être la plus intéressante du nouveau volume que M. Guizot vient d’ajouter à ses Mémoires est consacrée à l’histoire de l’Algérie sous le gouvernement du maréchal Bugeaud. Ce récit est très instructif et fort curieux à lire au moment où le voyage de l’empereur, semble devoir marquer pour notre colonie le commencement d’une ère nouvelle. Charles X avait pris Alger ; la conquête de l’Algérie fut faite par le gouvernement de 1830, et l’on peut dire que ce fut sous l’énergique, active et habile direction du maréchal Bugeaud, dans la période comprise entre 1841 et, 1847, que l’armée française établit notre domination sur les populations et le territoire de l’ancienne régence. Pour le gouvernement de cette époque et pour le maréchal Bugeaud se posaient dès lors les questions que l’empereur prend à cœur aujourd’hui et parait vouloir s’appliquer à résoudre. « Je suis aussi frappé que vous de la nécessité d’agir en Afrique pendant la paix de l’Europe, écrivait M. Guizot au maréchal ; l’Afrique est l’affaire de nos temps de loisir. » Vingt ans après, la même pensée préoccupe évidemment l’empereur, et nous le voyons profiter du loisir de la paix pour imprimer une nouvelle impulsion à notre entreprise algérienne. Par des extraits de la vive correspondance du maréchal Bugeaud, par une esquisse du système de guerre du maréchal qu’a tracée un de ses plus intelligens élèves, le général Trochu, M. Guizot nous fait comprendre comment fut conduite et achevée l’œuvre de la domination militaire. Tandis qu’il poursuivait la conquête avec tant de feu et de sûreté de jugement, le maréchal Bugeaud avait toujours aussi présente à l’esprit la seconde condition de notre succès, la nécessité d’une colonisation rapide et vaste. A la fin de 1845, au moment où il partait pour aller réprimer le dernier soulèvement, général qu’ait pu faire éclater contre nous Abd-el-Kader, le maréchal Bugeaud écrivait au maréchal Soult : « Nous avons affaire à un peuple énergique, persévérant et fanatique ; pour le dompter, il faut nous montrer, plus énergiques et plus persévérans que lui, et après l’avoir vaincu plu-