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cherche à créer non-seulement des artistes, mais à fournir des dessinateurs habiles aux industries qui ont les arts pour auxiliaires. C’est aux besoins particuliers de l’industrie qu’un citoyen de Lyon, Claude Martin, major-général dans les Indes, a voulu pourvoir par la fondation de cette célèbre école professionnelle, dite « école de La Martinière. » Des externes seuls y sont admis et reçoivent pendant deux ans un enseignement gratuit qui comprend, outre la théorie des sciences industrielles, une sorte d’apprentissage et des travaux manuels. La Martinière, autrefois cloître, puis caserne, maintenant école, a été visitée avec la plus sympathique attention par tous ceux qui s’intéressent aux progrès de l’instruction populaire : les méthodes d’enseignement qu’on y emploie ont mérité des juges les plus compétens les plus flatteuses approbations. Toutefois, malgré tant d’établissemens privés et publics dont la ville de Lyon est pourvue, le département du Rhône ne figure que le treizième sur la liste que le général Morin a dressée des départemens français où l’instruction est le plus répandue. Le dixième des jeunes gens appelés au tirage au sort en 1862 ne savait encore ni lire ni écrire. Le reste du département est, on ne peut le nier, moins bien partagé que le chef-lieu. Le travail du savant général, qui a excité partout une si vive attention, devra néanmoins éveiller une sollicitude plus particulière encore dans une cité qui a le juste orgueil de se distinguer par ses aptitudes intellectuelles non moins que par ses habitudes philanthropiques. Déjà au reste une juste émulation s’est rallumée dans les diverses classes de la société lyonnaise ; le nouveau cours d’économie politique était à peine rouvert par les soins généreux de la chambre de commerce, qu’une société composée d’hommes de toutes classes et de tout rang, administrée par un conseil où les artisans ont une juste place, fondait de nouveaux cours d’instruction professionnelle que les ouvriers suivent en foule et avec la plus religieuse attention.

Les budgets municipaux témoignent hautement de cette sollicitude pour le développement de l’instruction et pour l’amélioration du sort des pauvres. En 1854, la population lyonnaise, par suite de l’annexion des faubourgs, s’élevait à 258,000 habitans, et les dépenses à 4,039,000 francs ; or la part de la bienfaisance était de 690,000 francs, celle de l’instruction primaire de 341,000 fr., celle des beaux-arts et de l’enseignement supérieur de 141,000 francs. Dans le budget de 1864, appliqué à 318,000 habitans, et qui se solde par 5,400,000 francs de dépenses ordinaires, on consacre à la charité 495,500 francs, à l’instruction primaire 393,000 fr., aux beaux-arts, etc., 174,770 francs. Après de très grands efforts accomplis par l’administration municipale en partie spontanément,