Page:Revue des Deux Mondes - 1865 - tome 57.djvu/255

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

bre. M. Gladstone a fort bien dépeint cette lutte des taxes par un vers virgilien :

Circumstant fremitu denso, stipantque frequentes.

Il n’y aurait pas de discours financier parfait en Angleterre sans une citation latine bien amenée. M. Gladstone a éconduit la taxe sur le malt, patronnée par les tories, mais il a parfaitement accueilli le droit sur le thé et l’income-tax, qu’il a favorisés de réductions notables et entre lesquels il a partagé son magique surplus. Ainsi, chose curieuse, tandis que dans le reste du monde la dépense va toujours plus vite que le revenu et que chacun s’endette et emprunte, l’Angleterre résout sous nos yeux ce problème unique d’opérer des réductions importantes sur le capital et les arrérages de sa dette, de réaliser chaque année des excédans de recettes, et de les appliquer à de fécondes réductions des impôts directs et indirects. Singulière infériorité du gouvernement parlementaire ! Quand nous demandons sur le continent à nos pouvoirs absolus de nous accorder la liberté, ils nous disent que nous ne sommes point dignes encore de la liberté anglaise. Que notre vengeance soit de leur répondre : Et vous qui nous donnez de si haut des leçons si humiliantes, essayez du moins de mettre vos finances à la hauteur des finances anglaises ; vous aurez beau faire, jamais vous n’y réussirez sans la liberté !

Un pays que les difficultés d’un enfantement politique trop récent empêchent encore d’avoir des finances bien réglées, quoiqu’il ait des institutions libérales, c’est l’Italie. Ne pouvant aspirer encore à équilibrer ses revenus avec ses dépenses, le gouvernement italien, tout en remaniant l’impôt de façon à le rendre plus productif, fait appel aux ressources extraordinaires et à l’emprunt, et assure ses recettes pour deux ans. A mesure que l’opinion en Europe se familiarisera davantage avec les affaires italiennes, on comprendra plus facilement que l’Italie est en état de faire face aux engagemens qu’elle contracte, et ne tardera point à sortir de la période laborieuse des emprunts. C’est ce qu’a parfaitement démontré le comte Arrivabene dans une brochure qu’il vient de publier sous la forme d’une lettre adressée à lord Stratford de Redcliffe. Mais un incident religieux plus piquant qu’une question de finances occupe en ce moment l’attention de l’Italie et de l’Europe. Nous voulons parler de l’ouverture que le pape a faite au roi Victor-Emmanuel relativement à l’administration des diocèses italiens, ouverture qui a motivé la mission de M. Vegezzi à Rome. Nous n’avons point la pensée d’exagérer l’importance de ces premières relations engagées entre la cour de Rome et l’Italie. Il n’est pas cependant interdit aux politiques les moins téméraires d’y voir avec plaisir la fin de l’état violent où Rome et le gouvernement italien se trouvaient vis-à-vis l’un de l’autre. L’avenir nous apprendra ce que le bon sens du pape et la finesse italienne pourront tirer de ce premier échange de paroles et d’idées. Nous persévé-