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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.



14 juin 1865.

La matière des finances publiques n’encourage point les fantaisies enchanteresses de l’esprit d’utopie. Nous le savons, et pourtant il est un rêve que nous ne pouvons nous empêcher d’évoquer de temps en temps avec complaisance à propos des finances françaises. Nous rêvons qu’un beau jour un ministre hardi autant que sage, tout en conservant le système de comptabilité récemment introduit, — le budget ordinaire, le budget spécial, le budget extraordinaire, dûment balancés par un budget rectificatif, — se présente en fin de compte à la chambre avec un excédant des recettes sur les dépenses égal, pour prendre un chiffre qui ne soit point une hypothèse excessive et arbitraire, aux 126 millions qui, après l’annulation des rentes rachetées, vont former la dotation normale et nominale de l’amortissement. Se figure-t-on un budget combiné de telle sorte qu’il pût ménager à la chambre et au pays une ressource disponible de 126 millions ? Nous supposons que le ministre des finances de nos rêves, en apportant ce résultat, l’exposerait comme le point de départ d’un système rationnel et régulier destiné à se reproduire et à se renouveler d’année en année. Il dirait au pays : « Maintenant que nous avons un excédant qui, à proprement parler, n’exprime que l’équilibre normal, puisqu’il représente seulement la dotation légale de l’amortissement, il importe de partir du bon pied, et de ne plus retomber dans la confusion des dépenses déréglées, des arriérés, des déficits, des expédiens empiriques et des emprunts francs ou déguisés. La dépense devra désormais se contenir dans les bornes de la recette. Nous devons nous interdire tout engagement financier encouru à l’aventure ; au lieu d’escompter l’avenir comme des besoigneux et de nous soumettre aux difficultés et aux dégoûts d’une gêne incessante, nous emploierons les ressources du présent et les ressources vraisemblablement croissantes de l’avenir comme des riches qui disposent avec assurance et