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de Périclès. L’Etrurie reçut le contre-coup de ces révolutions : elle fut pénétrée par les idées nouvelles ; des guerres civiles éclatèrent au sein des villes, et la constitution séculaire de la confédération fut altérée. Ces troubles eurent pour résultat immédiat de relâcher le lien fédéral, et les Latins, émus eux-mêmes par l’amour de la liberté, crurent l’occasion favorable pour se délivrer à la fois de leurs rois et de la domination étrusque.

Tout le monde sait comment la royauté fut définitivement abolie. Ce que l’on sait moins, c’est que Rome fut soumise de nouveau par les Étrusques et rattachée à leur confédération d’une manière étroite. La rébellion des Romains et leurs premiers succès contre les villes alliées des Tarquins émurent les Toscans et suspendirent leurs querelles intestines. On s’intéressait peu aux podestats chassés, et on les abandonna assez promptement ; mais on ne pouvait abandonner la clé du Tibre, c’est-à-dire Rome ; on ne pouvait laisser couper les communications avec la Campanie et les douze cités qui formaient la confédération du sud. Porsenna, lars de Clusium, fut reconnu pour chef militaire ; l’armée, formée des contingens réglés par la loi et fournis avec zèle par chacun des peuples de la Toscane, vint assiéger Rome. Rome, incapable de résister à tant de forces réunies, ou capitula ou fut prise. Ce souvenir révolta plus tard l’orgueil du peuple-roi ; on le déguisa sous d’héroïques légendes ; on nia même un fait que l’éloignement des temps permit d’altérer. Porsenna ne fut plus qu’un voisin débonnaire, encadré par les figures romanesques de Scœvola, de Clélie et d’Horatius Coclès ; mais la critique moderne ne se paie plus d’anecdotes, et confond les mensonges officiels imposés aux écrivains latins par les aveux involontaires des historiens eux-mêmes. Quand ils nous font savoir, par exemple, que le sénat envoya les insignes de la royauté à Porsenna, c’est-à-dire le sceptre, la robe de pourpre et le trône d’ivoire, il est aisé de discerner qu’un tel hommage était moins un acte de reconnaissance qu’un acte d’éclatante soumission. S’ils parlent des otages livrés avec Clélie, nous songeons aussitôt que ce sont les vaincus d’ordinaire, et non les vainqueurs, qui remettent des gages d’obéissance et de fidélité. Pline le naturaliste, qui n’était point sur ses gardes lorsqu’il décrivait les métaux, et qui oubliait les fictions de la politique tandis qu’il poursuivait la science et la vérité, a écrit cette phrase : Dans le traité que Porsenna accorda au peuple romain, nous trouvons cette clause expresse que les Romains renonceraient à l’usage du fer, excepté pour cultiver la terre. Quoi ! livrer ses armes, convertir tout le fer qu’on possède pour se défendre en bêches et en socs de charrue ! Quelle condition est plus dure, quel abandon plus humiliant ? Du reste, Tacite, le grave et véridique