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mission économique et financière, a présenté à l’opinion publique un exposé très complet et très instructif de ses impressions personnelles. Enfin M. Rouher a fait connaître les intentions du gouvernement à l’endroit de cette entreprise mexicaine et sa confiance dans le succès final. Notre opinion sur l’affaire du Mexique est connue, et nous n’avons pas besoin de la reproduire encore une fois à propos de la dernière discussion. Ce qui est certain, c’est d’abord que l’expédition du Mexique n’a point été pour nous, comme d’autres guerres et d’autres entreprises, une conséquence nécessaire, inévitable d’engagemens créés par nos intérêts ou par notre honneur ; c’est qu’en outre elle n’a point été le produit d’une inspiration et d’une volonté de l’opinion publique. À propos des affaires de cette nature, excentriques au mouvement naturel de la nation, il convient de prendre garde à deux choses : à la façon dont on y entre et à la façon dont on en pourra sortir. Nous n’avons point approuvé la façon dont nous sommes entrés au Mexique ; mais nous faisons les vœux les plus sincères, les plus ardens pour que nous en puissions sortir pacifiquement et honorablement. Nous allons plus loin, nous tournons nos espérances du côté de nos vœux, persuadés que le moyen le plus sûr de conduire une affaire à bonne fin est d’avoir confiance dans le succès. Nous écartons en conséquence les mauvais présages ; nous avons le ferme espoir que nous ne serons point dérangés dans l’œuvre du Mexique par des diversions des États-Unis. Nous ne prenons point au sérieux les tentations offertes du côté du Mexique à M. Lincoln par les commissaires des états du sud ; nous ne redoutons point les rodomontades auxquelles se livre une partie de la presse de New-York ; nous croyons au bon sens, à la modération, à la fermeté des hommes qui sont placés à la tête du gouvernement des États-Unis. Nous ne doutons point que ces hommes, après la fin de la guerre civile, avec les ruines qu’ils auront à réparer, les transformations qu’ils devront accomplir, ne se consacrent à ce grand travail de réédification intérieure, et ne repoussent la périlleuse perspective d’une guerre étrangère. Nous regrettons assurément que, tandis que nous contractions la tâche de régénérer le Mexique, nous n’ayons point mis plus de soin à ménager l’amour-propre et la cause morale du gouvernement des États-Unis. Il a été commis à cet égard des indiscrétions et des maladresses dont nous voudrions pouvoir effacer le souvenir. Il faut l’espérer, les dernières paroles que M. Rouher a prononcées à l’adresse des États-Unis auront la vertu de faire oublier d’anciennes fautes. Nous savons que les sympathies de M. Rouher dans le grand conflit américain ont été pour le nord, et nous n’avons jamais confondu cet esprit sagace et robuste avec les politiques superficiels et frivoles qui ont cru à la rupture de l’Union américaine, qui se sont figuré que la catastrophe de la grande république pourrait être un événement favorable à la France. Si le Mexique pouvait devenir entre les États-Unis et nous un motif de guerre, nous saurions assurément repousser une agression injuste ; mais