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en bons de l’Échiquier, aux négocians qui en seraient dignes ; mais déjà le fort de la crise était passé, et le succès des armées anglaises en Espagne comme l’ouverture du marché russe amenèrent une nouvelle période de prospérité.

Les crises de 1815 et 1818 furent moins graves. Celle de 1815 fut produite surtout par un excès de spéculation, auquel avaient donné lieu les espérances exagérées basées sur le retour de la paix. Cette fois les banques locales furent les principales victimes ; deux cent quarante d’entre elles succombèrent. 1816 fut encore une année difficile, mais l’année 1817 s’ouvrit sous les plus favorables auspices. Les affaires reprirent leur essor, la confiance reparut ; l’or était abondant, et la réserve métallique de la Banque s’éleva à 11,668,260 liv. sterl., chiffre énorme qui n’avait jamais été atteint, et qui permit même de reprendre momentanément les paiemens en espèces. Malheureusement cette situation favorable ne dura pas longtemps. L’abondance de l’argent en Angleterre y avait naturellement fait baisser le taux de l’intérêt. Les emprunts émis par la France, l’Autriche et la Russie offraient au contraire des placemens très avantageux, qui séduisirent les capitalistes anglais. Pendant l’automne de 1817 et durant toute l’année 1818, il se fit de grandes importations de céréales et d’autres marchandises à des prix élevés[1]. Il en résulta la nécessité de faire à l’étranger de fortes remises. Le change devint défavorable, et comme conséquence inévitable l’or s’écoula rapidement. La réserve métallique de la Banque, qui dépassait. Il millions de livres sterling au 31 août 1817, tomba à 8 millions en mai, à 6 en avril et à 5 en novembre. Les suites ordinaires d’une diminution dans la quantité des instrumens de l’échange ne tardèrent point à se déclarer : contraction du crédit, avilissement de toutes les valeurs, pertes sur les marchandises importées, faillites, crise. La Banque avait dû suspendre ses remboursemens en argent, tout volontaires du reste. Quand la situation se fut de nouveau détendue en 1819, le parlement, sous l’inspiration de Robert Peel, vota le bill pour la reprise des paiemens en espèces, qui eut lieu effectivement en mai 1821, quand la réserve métallique atteignit le chiffre, inouï jusqu’alors, de 11,900,000 livres sterling.

Après ce coup d’œil rapide jeté sur les crises relativement peu graves de 1810, 1815 et 1818, nous allons maintenant étudier de plus près celle de 1825, qui nous offrira des caractères presque semblables, mais sur une plus large échelle. Le souvenir de cette grande convulsion économique s’est conservé en Angleterre comme

  1. Le chiffre des importations pour la consommation intérieure monta de 11,306,934 livres sterling en 1816 à 23,010,773 en 1818.