Page:Revue des Deux Mondes - 1864 - tome 54.djvu/489

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


IX


Les machines, voilà ! Ne parlons plus des vieux,
Ensevelissons-les dans un oubli pieux.
Les machines, monsieur, c’est là qu’est notre gloire ;
Les machines un jour écriront notre histoire.
Inutile d’agir, inutile de croire :
Les machines, c’est tout, — et tout est pour le mieux.

X


Ah ! quand l’enivrement des amours éternelles
Accouplait l’âme ardente avec la vérité,
Quand le premier rayon de l’immortalité
Etoilait du mourant les douteuses prunelles,
Alors qu’Athène et Sparte, ainsi que deux mamelles,
Allaitaient de leur sang la jeune liberté ;

XI


Quand l’ivresse du bien avait sa jalousie,
Que le juste exilé s’éloignait radieux,
Que la charité seule avec la poésie
Filait du héros mort le linceul glorieux ;
Quand des mains de Platon découlait l’ambroisie
Que les dieux d’autrefois versaient pour d’autres dieux ; ,

XII


Quand l’éclair de l’épée était une lumière
Dont Rome illuminait la huit des nations,
Et que le peuple, même en ses rébellions,
Au mur de la patrie était comme le lierre,
Quand les Brutus clouaient leurs cœurs à cette pierre,
Quand la louve de bronze enfantait des lions ;

XIII


Ah ! quand Jésus naissait comme l’aube se lève,
Lorsque, sublime et seul, le céleste émigré
Allait par ce pays lointain, doux et doré,
Petit comme un berceau, mais grand comme le rêve,
Et, semant l’avenir, fondait l’œuvre ignoré
Commencé par le verbe, achevé par le glaive ;