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sions, enquêtes, discussions, rapports, rien ne fut négligé de ce qui pouvait éclairer le pays sur une question qu’il considérait comme capitale, et pour laquelle il accordait de plein gré des subventions énormes. Si abondant que fût le flot de population qui arrivait en Australie, en dépit même des crises commerciales qui entravèrent les progrès de la colonie, industriels et propriétaires terriens répétaient tous et toujours qu’ils manquaient de bras. En 1847, le conseil législatif de la Nouvelle-Galles du Sud déclarait que les ouvriers faisaient de plus en plus défaut, que la prospérité du pays dépendait de la prompte introduction d’une grande quantité d’hommes, et que s’il arrivait vingt mille individus dans l’année, on trouverait aisément à les employer. A supposer que la vente des terres ne fût pas suffisante pour subventionner une telle immigration, il valait mieux, disait-on, contracter un emprunt en donnant pour gage le revenu territorial des années subséquentes. En présence de tels efforts, on comprend mieux comment l’Australie avait déjà réussi à attirer une population de 250,000 âmes avant que les mines d’or ne fussent découvertes. Plus tard, la population s’accrut avec tant de rapidité que les gouvernemens provinciaux n’eurent plus qu’à se préoccuper d’assurer le recrutement de certaines professions d’élite et de maintenir une juste proportion entre les deux sexes. En 1861, il arrivait 44,760 immigrans, dont 5,445 seulement avaient reçu l’assistance de l’état, et les dépenses s’élevaient à 1,600,000 fr., ce qui donne un peu moins de 350 fr. par individu. Au reste, les diverses provinces n’ont sur ce sujet ni les mêmes façons de penser ni les mêmes moyens d’action. L’Australie méridionale, qui ne peut offrir aux Européens la grande attraction des mines d’or, reçoit proportionnellement plus d’immigrans assistés que les autres parties du continent. Victoria ne fournit guère le passage gratuit ou à prix réduit qu’aux femmes; la Tasmanie délivre encore des billets de passage à prix réduit aux ouvriers qui s’engagent à rester quatre ans dans le pays; la Terre-de-la-Reine, où le sol n’attend que les travailleurs, donne à chaque adulte débarqué un lot de terrain d’une valeur de 450 francs, qu’il peut rétrocéder à l’armateur par lequel il a été transporté. Cette colonie étant la plus éloignée d’Angleterre, le prix du passage est aussi plus élevé, et monte précisément à cette même somme de 450 fr., en sorte que l’ouvrier est amené sans aucun frais jusqu’à sa nouvelle patrie. S’il n’a aucune ressource personnelle, il se trouve, en débarquant, aussi pauvre qu’au moment où il est parti d’Europe; mais il se procure sans peine du travail, un salaire élevé; la nourriture est à bas prix, et après deux ans de résidence la colonie lui fait un nouveau don gratuit d’environ 6 hectares. Il peut alors s’établir sur son propre