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de tous les cours d’eau. Il leur manque même le diluvium, ce dépôt de matières finement broyées et divisées qui constitue les terres propres à la culture, et qui est dû sans doute à d’immenses courans d’eau, à de grands déluges. Lorsqu’un cataclysme terrestre amène de nouvelles surfaces à la lumière du soleil, les terrains qui émergent ainsi ne sont pas capables de produire tout de suite les végétaux. Il faut d’abord qu’ils soient parcourus par les eaux courantes, qui arrachent aux montagnes des élémens minéraux de nature très diverse, les broient, les triturent et les mélangent pendant le transport, et les déposent sous forme de terre végétale. La préparation naturelle que doivent subir les terrains de sédiment pour devenir productifs n’est pas encore terminée dans le centre de l’Australie. L’homme est venu quelques siècles trop tôt sur ce sol encore imparfait.

Si ces contrées arides nous montrent une image rétrécie de ce que devait être la terre entière aux époques antédiluviennes, elles nous prouvent aussi combien les dégradations successives du sol brut ont indue sur le climat et les phénomènes météorologiques. Privé des pluies abondantes et régulières qui enrichissent les autres pays et des brises rafraîchissantes de la mer, le centre du continent a encore le désavantage de n’avoir ni hautes montagnes pour assembler les nuages, ni forêts pour conserver l’humidité à la surface du sol. Ce sont des plaines nues brûlées par un soleil presque tropical. Les pluies qui y tombent sont rares, incertaines et tout à fait insuffisantes pour compenser une évaporation très active. Aussi les vents qui traversent ce pays deviennent-ils secs et chauds comme au sortir d’une fournaise. Ces vents soufflent d’habitude du nord au sud, vers les colonies du sud et du sud-est, Victoria et l’Australie-Méridionale, où l’on en ressent à certains jours les désastreux effets. Ils sont surtout gênans pendant les années où la région intérieure reste tout à fait à sec. D’autres fois, au contraire, des pluies excessives tombent sur la région centrale et en renversent immédiatement le climat habituel. L’aspect du sol change aussi tout à coup. Partout où il y a un peu de terre, les plantes, nourries par un air chaud et vivifiant, croissent avec rapidité. Les vents deviennent humides, et les colonies voisines ressentent bientôt l’effet de ces changemens ; leur climat s’adoucit ; leur été est doux et tiède au lieu d’être brûlant. Ces changemens rapides, cette incertitude des phénomènes météorologiques, expliquent parfaitement les rapports contradictoires des voyageurs qui ont abordé la région centrale. L’été de 1844 à 1845 pendant lequel Sturt faillit périr de soif et de chaleur dans le désert fut remarquable par une sécheresse plus prolongée et plus intense que dans les années communes. Sur les côtes