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Pangani, remontèrent la rivière du même nom pendant quatre jours, la quittèrent pour faire l’ascension du Rongway, qui a deux mille pieds d’altitude. Ce pic est le premier gradin d’un plateau fort élevé sur lequel est assis l’Ousambara. Après trois jours de ; marche dans les montagnes, ils retrouvèrent le Pangani, qui n’était alors qu’un torrent. Le capitaine Speke, en ayant goûté l’eau, reconnut la saveur de la neige fondue. Ils continuèrent leur chemin en montant toujours et arrivèrent à Fonga, résidence du sultan de la contrée. Les voyageurs auraient bien voulu poursuivre leur marche vers le nord-ouest, traverser le Paré, franchir le Tagga pour atteindre le Kilimandjaro ; mais on leur dit que, pour faire cette exploration, il leur faudrait une escorte de cent hommes pourvus d’armes à feu, ce qui leur occasionnerait une dépense de 350 francs par jour. N’étant pas en mesure d’y pourvoir, ils revinrent sur leurs pas, et après une excursion d’une vingtaine de jours ils rentrèrent à Pangani, où la fièvre les surprit l’un et l’autre, leur faisant ainsi payer un premier tribut au climat.

Revenus encore malades à Zanzibar, ils durent y rester trois mois pour se remettre entièrement de la secousse que leur santé avait reçue. Ils avaient besoin de recouvrer toute leur vigueur, car ils étaient décidés à faire un sérieux effort pour franchir la distance qui sépare l’Océan-Indien de l’immense nappe d’eau d’Ukéréwé, regardée comme le point extrême des plus grandes lignes parcourues par le commerce arabe. Leurs préparatifs achevés, ils partirent le 26 juin 1857 avec une suite de quatre-vingts personnes. Ils mirent cinq mois à faire le trajet de la côte à Kaseh, marché considérable de l’Unyamuesi, situé sous le 5e degré de latitude sud et le 30° 36’ de longitude est. Après s’y être reposés quelques jours, ils reprirent leur route vers l’ouest en suivant la même latitude, et arrivèrent le 3 mars 1858 sur les bords de1 ce fameux lac que les Arabes appellent le lac d’Ujiji, et les naturels Tanganika. Il occupe un vaste bassin formé par une dépression du sol. Il s’étend du nord au sud.et a la forme d’une poire allongée ; son élévation au-dessus du niveau de la mer est de dix-huit cents pieds. Une chaîne de montagnes, dont l’altitude varie de cinq à six mille pieds, en entoure l’extrémité nord. La moyenne de sa largeur peut être de 45 kilomètres, et sa longueur de près de 500. Le 27e degré de longitude est le partage en deux parties égales. Ses rives, découpées de la façon la plus pittoresque, offrent d’excellens ports. Les collines qui se dressent en amphithéâtre tout autour sont couronnées d’épaisses forêts. Une multitude de petites îles très rapprochées du rivage lui forment comme une guirlande de bouquets Verts dessinés sur un fond bleu. Ces îles, ainsi que la terre ferme, ont une population qui peut au besoin fournir à l’émigration, et chez laquelle les marchands