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préparée dans les conditions les plus favorables pour triompher de tous les obstacles, ne put remonter plus haut que le 3° 22’ de la même latitude, à la distance de soixante-quinze lieues environ de la sortie du Nil du lac Nyanza. Arrêtée par de nombreux rapides et toujours en présence du même volume d’eau, découragée par la perspective d’un voyage dont elle n’entrevoyait pas la fin, elle rentra en Égypte sans avoir atteint le but essentiel de sa mission.

Ces insuccès répétés ne furent pas néanmoins sans profit pour la science ; on comprit que les sources du Nil devaient se trouver sous l’équateur et même encore plus au sud, et qu’il serait plus facile de les découvrir en partant de la côte orientale de l’Afrique et en avançant en droite ligne vers l’ouest qu’en se dirigeant du nord au sud, comme c’était l’habitude des explorateurs. Ces déductions conjecturales reçurent un commencement de sanction par la découverte que firent des missionnaires allemands que la société des missions de l’église anglicane avait placés dans le Zanguebar et dont la station était près de Mombaze, port de mer sur l’Océan-Indien. Désireux de contribuer, autant que leurs travaux évangéliques le leur permettaient, aux progrès de la géographie, et avec l’arrière-pensée qu’ils pourraient bien être les heureux mortels qui révéleraient au monde savant le mystère de la naissance du fleuve égyptien, ils firent d’abord plusieurs essais d’exploration, pénétrant avec précaution, mais toujours plus avant, dans l’intérieur des terres. Ils se séparèrent ensuite pour embrasser dans leurs recherches une plus vaste étendue de pays. C’est ainsi qu’ils purent étudier les deux contrées de l’Oukambani et de l’Ousambara, la première au nord-ouest, la seconde au midi de Mombaze, et l’une et l’autre situées entre l’équateur et le 5e degré de latitude sud. En 1848, l’un d’eux, M. Rebmann, traversa ce dernier pays, atteignit les monts du Taïta, s’avança jusque dans la partie la plus élevée d’une autre région, le Tagga, et aperçut de là, à une distance de 50 à 60 kilomètres, le Kilimandjaro, dont la cime était couverte de neige. L’année d’après, son collègue, le docteur Krapf, étendit la ligne d’opération, à travers beaucoup d’obstacles et de périls, jusqu’à la distance de 6 à 700 kilomètres, et découvrit au nord-ouest de l’Oukambani, sous le premier degré de latitude sud, et à près de 300 kilomètres de la côte, le Renia, autre montagne à tête blanchie, dans le voisinage de laquelle se trouve un volcan. La maladie ayant forcé ce courageux missionnaire de retourner dans son pays, il fut remplacé par le docteur Erhardt, qui suivit avec intelligence et résolution les traces de son prédécesseur. Pour apprendre la langue des peuples au milieu desquels il devait exercer son ministère, il se rendit à Tonga, petite ville maritime sur l’Océan-Indien, et point de repère de plusieurs