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touchait aux rives du golfe de Carpentarie, il était encore repoussé du but par l’épuisement de ses vivres et par les buissons inextricables qu’il avait rencontrés sur son chemin. Lorsque enfin Stuart descendait sur les rivages de l’Océan-Indien, en juillet 1862, il y avait dix-huit mois que Burke avait observé l’effet de la marée sur les bords de la rivière qui fut le terme extrême de. son voyage. Il n’y a donc pas de doute sur la question de priorité, Burke est passé le premier d’une mer à l’autre ; mais, à cela près, les résultats obtenus par Stuart ont infiniment plus de valeur. Burke n’a pas vu la mer, car il s’est arrêté dans les marais qui s’étendent au long de la côte, tandis que Stuart a planté son drapeau au bord même de l’océan. Stuart a coupé le continent par le centre dans sa plus grande largeur ; il a fourni une course bien plus longue à travers les pays inconnus. Ne faut-il pas lui tenir compte aussi de sa prudence et de son habileté en tant que chef d’expédition ? Il n’a perdu aucun de ses compagnons ; il a su les préserver des maladies et accomplir son œuvre avec les seules ressources dont il disposait. L’expédition de Burke, au contraire, a été marquée par des pertes cruelles ; d’une vingtaine d’hommes qui y ont pris part, sept ont péri. Avec les subventions que le gouvernement et ses compatriotes avaient généreusement mises à sa disposition, il n’a pas su prendre les mesures qui assurent le succès. À chaque instant, on sent, dans la relation de son voyage, les marques de l’inexpérience et de l’imprévoyance qui lui ont coûté la vie.

Avant même que l’on eût appris à Melbourne la triste issue de cette expédition, les colons de la province de Victoria s’étaient préoccupés des voyageurs dont ils n’avaient reçu aucune nouvelle depuis longtemps, et lorsque Wright et Brahe rentrèrent dans la colonie sans être accompagnés par Burke, il fut décidé que l’on enverrait d’autres explorateurs à sa recherche. Les autres colonies donnèrent de pareilles preuves de sympathie aux malheureux que l’on supposait être perdus dans le désert. Tandis que le gouvernement de Victoria expédiait au fond du golfe de Carpentarie un bâtiment sur lequel étaient embarqués des chevaux, des hommes, des provisions, tout ce qu’il fallait pour organiser une expédition dont M. Landsborough prit le commandement, la Terre de la Reine faisait partir de Rockampton une autre troupe qui, sous les ordres de M. Walker, se rendait à travers la colonie au point où ce bâtiment devait aborder. En même temps aussi, l’Australie-Méridionale organisait une expédition sous les ordres de M. Mac-Kinlay. Ces trois entreprises n’atteignirent pas le but que l’on s’était proposé, car au moment où elles étaient prêtes à se mettre en route, le sort de Burke et de Wills était déjà connu. Néanmoins elles ont parcouru de vastes