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entre Rome et Civita-Vecchia, le père Secchi recommença la même étude par le même procédé, qu’il croyait nouveau. Un grand nombre de personnages illustres assistaient à ces expériences, qui réussirent à prouver une seconde fois, comme elles l’avaient fait une première, que les étoiles filantes sont, à la dimension près, de véritables bolides lancés dans l’espace à raison de plusieurs kilomètres a la seconde et venant s’illuminer dans l’atmosphère.

J’avais besoin d’entrer dans ces divers développemens avant d’expliquer comment les corpuscules cosmiques s’échauffent tout à coup jusqu’à se fondre et jusqu’à se volatiliser. La théorie que je vais exposer est une œuvre successive à laquelle ont concouru divers savans. Dès 1868, sir John Herschel en dessinait les premiers linéamens dans la Revue d’Edimbourg ; M. Haidinger en développa ensuite les principales conséquences, en 1861, devant l’Académie des Sciences ; mais c’est seulement en 1863 que M. Reinholds Reichenbach soumit à un calcul rigoureux les principes admis, par ses devanciers. Ces travaux nous permettent de faire théoriquement l’histoire des globes filans ; on va voir à quel degré elle se conforme aux faits observés.

Aussitôt qu’un bolide, avec l’énorme vitesse qu’il possède, vient à rencontrer l’atmosphère, il éprouve tout d’abord une résistance qui ralentit sa marche, résistance très considérable à cause de la rapidité de la course : elle, peut se calculer, et, d’après M. Reichenbach, elle suffirait pour éteindre presque complètement, après dix secondes, la vitesse d’un boulet que l’on aurait lancé à raison de 100 kilomètres à la seconde. Supposons qu’un bolide ait perdu seulement un centième de sa vitesse par cette cause, il aura nécessairement engendré une quantité de chaleur qu’on peut calculer avec certitude, et qui est employée à échauffer soit ce bolide lui-même, soit l’air qui l’entoure. Or M. Reichenbach nous apprend qu’elle suffirait pour élever la température de 75,000 degrés, en supposant qu’elle ne se dissipe pas par le rayonnement, et de 5,000 degrés seulement, si on admet qu’elle s’échappe aussitôt après avoir été produite. L’échauffement réel est donc compris entre 5,000 et 75,000 degrés, et il dépasse considérablement tout ce que nous pouvons artificiellement produire. Dans ces conditions, le bolide fond, et la surface se revêt de ce vernis vitreux caractéristique des pierres tombées. Non-seulement il fond, mais à 5,000 degrés le fer et le charbon brûlent en projetant de tous les côtés des étincelles brillantes, et toutes les substances connues se réduisent en vapeurs incandescentes. La météorite paraîtra donc enflammée, et sera suivie d’une traînée de feu qui lui donnera l’aspect des fusées. Cette traînée s’éteindra ensuite, mais les matières qui lui ont donné naissance, restant suspendues dans l’atmosphère, y laisseront un nuage persistant.

Si elle est de petite dimension, c’est le cas ordinaire, la pierre brûle en totalité : on voit une étoile qui file, se réduit en fumée, et tout est fini ; quand elle est plus grosse, elle dure plus longtemps et fournit une plus