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excursions : heureux ceux qui en sont quittes à ce prix ! Quant au diamant vivant, profitant sans doute de la bagarre de la nuit, il s’échappa ou servit de festin à quelque bande de fourmis nocturnes.

Tout ce qu’on a dit sur le district diamantin de la province de Minas-Geraes peut s’appliquer, du moins en partie, aux autres terres diamantifères du Brésil, qu’on rencontre dans les déserts de Matto-Grosso, de Goyaz et de Minas-Novas. L’éloignement et probablement aussi d’autres causes locales les ont rendues moins célèbres que celles du Serro-do-Frio. Cependant elles ont de l’importance, comme un seul fait le prouvera. À Cuyabá et dans d’autres endroits de l’intérieur, on ne prépare jamais un oiseau ou une volaille sans visiter attentivement le gésier et les intestins. On sait que ces animaux avalent quelquefois de petits cailloux, et il n’est pas rare d’y rencontrer des diamans. Tant d’exploitations réunies, bien que quelques-unes soient presque épuisées, donnent encore d’assez abondantes récoltes, et on peut dire que c’est le Brésil qui depuis longues années approvisionne l’Europe de pierres précieuses. L’exportation annuelle a été évaluée en moyenne à 20,000 karats dans les derniers temps de la domination portugaise, et on estime à 2 millions de livres sterling les diamans qui ont enrichi la couronne de Portugal. Bien que le rendement ait considérablement diminué en beaucoup d’endroits, il ne faudrait pas trop se hâter de conclure à un appauvrissement définitif. Quiconque a parcouru cet empire sait qu’il est couvert d’immenses forêts encore inconnues de l’Européen, qui peuvent d’un jour à l’autre révéler de nouvelles richesses aussi séduisantes que celles qui attirèrent l’attention des premiers Paulistes. Il y a une vingtaine d’années, un esclave qui avait travaillé au Serro-do-Frio fut emmené dans la province de Bahia. Comme il gardait ses troupeaux, il crut reconnaître dans le sol les caractères du cascalhao diamantifère ; il se mit à l’œuvre sans parler de sa découverte, et en vingt jours il avait déjà réalisé 700 karats. Ayant sans doute quelque motif de haine contre son maître ou ne croyant pas à sa générosité, il s’enfuit pour aller vendre son trésor dans quelque ville éloignée. Soit imprudence, soit toute autre cause, il éveilla des soupçons, fut arrêté et reconduit chez son maître. Celui-ci, voyant que ni les promesses, ni les menaces, ni les châtimens ne pouvaient lui arracher son secret, eut recours à une ruse fort simple. Il feignit de prendre son parti de ce silence obstiné, et renvoya l’esclave à ses travaux habituels. Le noir attendit quelque temps, soupçonnant un piège, et, lorsqu’il se crut complètement oublié, il recommença ses explorations, mais cette fois au clair de lune. Il va sans dire qu’il était soigneusement épié. La nouvelle se répandit comme l’éclair dans toute la province. Des