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en est toujours qui trouvent moyen de tromper la surveillance de leurs gardiens : ce sont eux qui alimentent d’ordinaire le commerce des contrebandiers. On connaît l’histoire de cet intendant qui, ne croyant pas à une aussi grande dextérité de la part des noirs, voulut un jour en avoir le cœur net, et promit la liberté à l’un d’eux, s’il parvenait à dérober en sa présence un diamant caché dans un monceau de cascalhao. On pense bien que l’offre fut acceptée. L’esclave se mit immédiatement à l’œuvre, tandis que le Portugais, placé en face de lui, suivait tous ses mouvemens. À la fin, celui-ci, s’impatientant et croyant déjà, triompher, demanda au noir s’il s’avouait vaincu. — Senhor, répondit gravement l’Africain, si l’on peut compter sur la parole des blancs, je suis libre. — Et tirant en même temps une pierre de sa bouche, il la montra à l’intendant. La bouche paraît être la cachette de prédilection ; aussi les feitors ne manquent pas, lorsqu’ils soupçonnent un nègre, de la visiter soigneusement.

Rien de plus obscur jusqu’ici que l’explication de l’origine du diamant et de la présence exclusive de cette pierre dans certaines contrées. Le Serro-do-Frio, la région diamantifère par excellence du Brésil, offre un contraste des plus étranges, par son aspect nu et sévère, avec la riche végétation qui l’enveloppe. C’est pour ainsi dire une enceinte circulaire de pitons aigus formant barrière de toutes parts. La capitale, Tijuco, où se tiennent les officiers de l’administration, s’élève à plus de 1,000 mètres au-dessus du niveau de l’Océan. Les flancs de ces pics, calcinés sans relâche par le soleil des tropiques ou noyés dans les brumes qui couvrent d’ordinaire les hautes cimes, sont rendus encore plus rougeâtres par l’énorme quantité d’oxyde de fer que renferme le sol. C’est ce mélange d’argile ferrugineuse et de cailloux roulés qui constitue le cascalhao. On y rencontre aussi de l’or, et on se rappelle que c’est en cherchant ce dernier métal que les mamelucos trouvèrent les premières pierres précieuses. C’est ordinairement du lit de ces ruisseaux qu’on extrait le cascalhao. Cette opération se fait dans la saison sèche, qui permet de détourner le cours des rivières. L’époque des pluies arrivée, on lave les terres préparées pendant les mois précédens. Tous les ruisseaux du Serro-do-Frio sont loin d’être également riches. Le plus célèbre dans les annales diamantines est le Jiquilinhonha. Les noirs employés à l’exploitation reconnaissent plusieurs genres de cascalhao. Le plus riche contient une espèce de silex noir ou marbré voisin de la cornaline. Plus ce silex est noir, plus il est un indice sûr. Vient ensuite la pedra de osso (pierre d’os), grès très pur qui a l’apparence d’os longtemps enterrés. Une argile ferrugineuse cimente le tout. Bien des hypothèses ont été imaginées par les divers voyageurs qui ont visité ces districts pour expliquer la présence