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situations acquises par de grands services, par le travail ou l’économie, la plupart héréditairement transmises et honorablement conservées, dans le dessein de les soumettre à un nivellement dont l’effet eût été aussi préjudiciable aux classes aisées qu’aux classes laborieuses, puisqu’en diminuant la richesse des uns il eût réduit la demande de travail et par suite les moyens de subsistance des autres. Aussi la motion fut écartée, et le plan du gouvernement adopté par une majorité de 187 voix contre 17. Du reste, l’opinion publique accueillit sans défaveur le nouvel impôt. En présence des dangers à combattre et des besoins urgens auxquels il fallait pourvoir, le sentiment de l’intérêt privé disparut devant celui de l’intérêt général, et pour donner une idée de l’esprit qui régnait alors en Angleterre il suffit de rapporter une adresse votée à l’unanimité par le commerce de Liverpool, qui, à l’exemple de celui de Londres et de plusieurs grandes villes, crut devoir dans cette circonstance donner au cabinet un témoignage de son adhésion. «Déterminés, y était-il dit, par la conviction que les ressources de la nation suffisent pour assurer le maintien de ses droits et la défense de son honneur, et assurés que plus nous montrerons de fermeté et de vigueur, mieux l’ennemi appréciera l’étendue de notre puissance et l’impossibilité d’un triomphe, nous sommes prêts à soutenir toutes les mesures que les chambres, dans leur sagesse, jugeront convenable de prendre afin de mettre le gouvernement à même de se procurer les fonds nécessaires pour continuer énergiquement la lutte. Nous espérons que, devant ce témoignage de nos facultés et de notre volonté, l’ennemi renoncera à poursuivre l’exécution de ses plans de dévastation et de conquête, et que nous pourrons ainsi arriver, avec le secours de Dieu, au but de tous nos efforts : une paix sûre, durable et honorable. »

Des 18,500,000 livr. st. empruntées dans le courant de l’année 1799, 10 millions le furent sur la garantie de la nouvelle taxe, dont le produit, au fur et à mesure des recouvremens, fut affecté au remboursement; mais, ce produit n’ayant été que de 7,500,000 l. en 1799, les 2,500,000 de surplus furent remboursés avec celui de l’année 1800, et la somme réellement empruntée fut ainsi de 8,500,000 liv. st. au taux de 5 1/2 pour 100. Évidemment, si l’on tient compte du prix de la rente à cette époque, le parti pris par le gouvernement de demander à l’impôt quelques-unes des ressources dont il avait besoin était conforme aux règles d’une bonne économie. Non-seulement il put ainsi se procurer à des conditions meilleures les 8,500,000 liv. qui entrèrent définitivement dans la dette fondée, mais, si les autres 10 millions n’eussent pas été remboursés, le service de l’amortissement et de l’intérêt de cette dernière somme eût grevé pendant longues années le trésor d’une charge annuelle de