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mesures dont l’exécution entraînait le vote d’un crédit ou l’établissement d’un impôt, le roi, après avoir constaté la situation prospère du revenu, avait pu très constitutionnellement exprimer l’espoir que la chambre des communes profiterait d’une occasion aussi favorable pour diminuer les charges dont elle avait dû, dans des circonstances moins heureuses, grever le pays. « Sans doute, ajouta-t-il, si sa majesté avait spécifié les taxes qui pouvaient être supprimées, ou précisé la somme dont le revenu public pourrait être diminué, elle serait sortie de ses attributions; mais en se bornant, dans les termes les plus généraux et les plus irréprochables, à appeler l’attention de la chambre sur la possibilité, dans l’état présent de l’Europe et de l’Angleterre, de réduire jusqu’à un certain point le fardeau qui pesait sur ses sujets, elle n’a fait que remplir un devoir. »

L’incident n’eut aucune suite, et les sentimens de satisfaction et de confiance exprimés par le roi furent confirmés quelques jours après par Pitt dans l’exposé de la situation financière qu’il fit le 17 février 1792 à la chambre des communes. Le succès du ministre était complet, et les résultats de son habile administration ne pouvaient plus être contestés; le pays allait en profiter et être dégrevé d’une partie des charges qu’il avait dû s’imposer pour remplir les engagemens contractés pendant une période de revers.

Depuis 1783, toutes les branches de la fortune publique avaient prospéré. Par le retour de la sécurité, le chiffre des opérations commerciales du royaume avec l’étranger s’était élevé de 28 à 40 millions de livres sterling, et le nombre des bâtimens marchands avait presque doublé. Par toutes les garanties données au crédit, le prix des consolidés 3 pour 100 était monté de 54 à 97 liv., et d’un autre côté le revenu public avait augmenté de li millions de liv. sterl. Un million était le produit de nouvelles taxes, un autre le résultat de mesures prises contre la fraude, et deux millions étaient dus à l’accroissement de la richesse et de la prospérité nationales. En 1791, le revenu public était de 16,730,000 liv.; il avait dépassé de 300,000 celui de 1790 et d’un demi-million le revenu moyen des quatre années antérieures. On pouvait donc sans témérité évaluer en moyenne à 16,200,000 livres celui des années futures. Quant aux dépenses, par l’effet de sages économies et de l’ordre rétabli dans les diverses branches de l’administration, malgré l’accroissement de la dette publique, elles avaient été réduites de 1,200,000 livres, et pouvaient être évaluées pour l’avenir à 15,800,000 liv. Il devait donc y avoir désormais un excédant annuel de 400,000 livres. Pitt proposa d’en affecter 200,000 à l’augmentation du fonds d’amortissement et de réduire jusqu’à concurrence de pareille somme le produit des taxes les plus onéreuses pour les classes pauvres et industrielles,