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envoyés en Corse pour étudier les ressources que les forêts peuvent y présenter reconnaissent les qualités du pin laricio et le jugent très propre à la mâture, bien que quelques-uns donnent la préférence au pin de Riga, comme étant plus léger, moins chargé de résine et surtout moins pourvu d’aubier. Toujours est-il que les difficultés qu’on a rencontrées jusqu’ici dans l’exploitation des forêts de la Corse ont empêché la marine de s’y approvisionner d’une manière régulière. Le pin laricio, débité en planches et en madriers, peut également être utilisé comme bois de charpente et employé aux mêmes usages que le pin sylvestre ordinaire ; mais il ne me paraît pas qu’on doive chercher à le substituer à ce dernier, comme on a essayé de le faire sur quelques points de la France, car la proportion de l’écorce et de l’aubier y est si considérable dans ses jeunes années, que, pour avoir des pièces de certaines dimensions, il faut le laisser sur pied jusqu’à un âge très avancé, ce qui en rend la culture peu avantageuse.

Le pin maritime est loin d’avoir la même valeur que son congénère. Quoique ayant un port régulier et atteignant d’assez grandes dimensions, il n’est pas employé dans la marine, ni même recherché pour les constructions civiles. D’une croissance rapide, il produit un bois mou et sans ténacité qui ne donne que des planches de seconde qualité et de la charpente de rebut. Depuis quelques années, on l’emploie avantageusement, après l’avoir injecté de sulfate de cuivre, pour la confection des poteaux télégraphiques ; mais le meilleur parti qu’on puisse en tirer est la fabrication de la résine, dont on a pu lire dans la Revue une intéressante description[1]. Cette industrie, récemment introduite en Corse, y prendra sans doute un certain développement, et contribuera à donner quelque valeur à une essence qui couvre une étendue considérable du pays.

Le chêne vert se rencontre tantôt mélangé avec les deux essences dont je viens de parler, tantôt à l’état pur, et formant parfois des massifs importans. Avec sa feuille petite, ovale, persistante, d’un vert sombre, il ressemble plus à l’olivier qu’au chêne de nos contrées, et n’étaient les glands qu’il produit, on ne s’expliquerait pas la place qu’il occupe dans la classification des botanistes. Le chêne vert croît très lentement et n’arrive jamais à une grande hauteur ; il donne un bois très dense, propre au charronnage et remarquable par la finesse et l’homogénéité de son grain. Ce bois se conserve très bien dans l’eau et fournit d’excellens pilotis ; quoiqu’il prenne bien le poli, il ne semble pas propre à être employé dans l’ébénis-

  1. Voyez, dans la Revue du 1er août 1863, les Landes du Médoc et les Dunes de la côte, par M. Elisée Reclus.