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tantôt l’organisation des bourdons, tantôt tous les deux à la fois. Souvent l’hermaphrodite, étant mâle à droite et femelle à gauche à l’extérieur, offre une disposition contraire à l’intérieur. En un mot, l’esprit peut supposer toutes les combinaisons possibles de sexualité externe ou interne : on les trouvait réalisées dans ces abeilles anormales. Une seule chose est constante chez toutes, c’est que ces hermaphrodites ne contiennent pas d’œufs comme les ouvrières ordinaires. Voici l’explication de ces anomalies. On sait qu’une fécondation complète engendre les ouvrières, qui ne sont que des femelles stériles ; l’absence de fécondation produit des mâles. Ces hermaphrodites proviennent d’œufs pondus dans des cellules d’ouvrières ; mais, la fécondation étant incomplète ou trop tardive pour des raisons qu’on ignore, il en résulte les hermaphrodites dont nous avons parlé. La discussion s’est établie sur cet intéressant sujet. M. de Filippi a cité des exemples d’œufs de vers à soie qui ont éclos sans avoir été fécondés. On a rapproché ces faits de ceux observés dernièrement sur les vaches par M. Thury de Genève ; ils tendent à montrer que ces animaux engendrent des mâles ou des femelles suivant le degré de maturité de l’œuf. Il serait donc possible de leur faire procréer à volonté des vaches ou des taureaux. On comprend toute l’importance d’un pareil résultat pour l’agriculture, et l’on espère que les expériences de M. Thury seront mises à l’épreuve sur une grande échelle. — M. le professeur Jules Pictet, l’auteur universellement estimé du meilleur et du plus complet traité de paléontologie que nous ayons, par la ensuite des coquilles fossiles enroulées et connues sous le nom d’ammonites, de toxoceras et d’ancyloceras. Des échantillons très complets lui ont appris que le genre toxoceras devait être rayé de la liste des mollusques céphalopodes. Le genre crioceras mérite d’être conservé malgré ses étroites affinités avec les ammonites.

Nous eûmes nous-même à entretenir la section de zoologie d’une découverte importante faite en 1862 par M. Charles Rouget, professeur de physiologie à la faculté de Montpellier. On ne savait point comment se terminent les nerfs qui se rendent à nos muscles et leur transmettent les ordres de la volonté. À l’œil nu, on voit le nerf entrer dans le muscle, pénétrer dans l’intérieur, s’y diviser en rameaux de plus en plus déliés ; mais l’œil, quoique armé du microscope, n’avait pas encore aperçu la terminaison même du nerf : on ignorait donc comment l’organe moteur s’unit avec celui qu’il met en mouvement. Le scalpel, dans ce genre de recherches, est un instrument dangereux : il divise, déchire et détruit ces organismes si fins et si délicats. À force d’études dirigées avec sagacité, M. Rouget est parvenu à voir nettement la terminaison des nerfs dans des